Home LITTÉRATURE SÉNÉGAL : Le nouveau livre de Marcel A. Monteil

SÉNÉGAL : Le nouveau livre de Marcel A. Monteil

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"Le mandat du chaos", Marcel A. Monteuil

L’auteur d’origine sénégalaise Marcel A. Monteil vient de sortir son premier livre « Le mandat du chaos ». Voici quelques extraits puissants : Le mandat du chaosÔ Kanka Moussa, toi le grand mansa, roi des rois, roi en or, du fond de ton mausolée, éclaire 7 fois ma route car ta fortune aussi immense fût-elle, n’a pu maintenir tes petits-enfants chez toi.

Toi Bakary II, empereur-explorateur, souverain navigateur, révèle-moi ton secret afin que j’affronte les démons de la mer. Je veux voir le bout du désert, je veux découvrir l’autre côté de l’océan.

Sogolon Kèdjou, femme humiliée par le handicap de ton fils, grand roi incapable de t’apporter une « feuille moderne de Baobab » imprimée à Chamalières, laisse-moi aller chercher le bonheur. Sassouma Bérété ne te raillera plus ; elle taira ses rires moqueurs et sa malveillance.

Prépare mes talismans, fait appel aux plus grands chamanes de l’empire du Négus, qu’ils soient en connexion avec la nature ou complaisants avec les esprits impuissants…je suis fin prêt.

Je pars puisque les mansas modernes indignes successeurs de Soundiata n’ont ni empathie, ni amour, ni compassion pour le peuple. Ils sacrifient les madrasas de leurs terroirs en même temps qu’ils envoient leur progéniture s’instruire chez Charlemagne. Ils les préparent à devenir de futurs Mokonzi et ourdissent lâchement leur plan : faire de nous d’éternels serviteurs. Cela ne peut continuer !

Ils ne se préoccupent plus du bien-être, de la santé et de l’épanouissement de leurs concitoyens qui croupissent dans les quartiers mal aménagés aux allures de marigots dès la première pluie. Les hôpitaux, s’ils ne sont pas inaccessibles, sont en ruine ou en faillite, des mouroirs pour pauvres. Eux, pendant ce temps, pour blanchir leurs dents jaunies par l’indolence et l’arrogance vont voir les toubibs des grandes cliniques du nord.

Marcel A. Monteuil

Je suivrai des yeux le doux sillage de fumée de l’oiseau en fer car je ne suis pas digne d’y prendre place. Les exigences pour y accéder sont si complexes, si éreintantes, si humiliantes pour nous autres…

J’irai ailleurs pour toi Sogolon Diata, je serai le petit Soundiata. Je veux m’épanouir, fuir ce Manikongo tyran, corrompu, sanguinaire chef de guerre, exploitant d’enfants soldats, ami des puissances coloniales. Je veux fuir cette famine, cette injustice…je veux tout simplement partir.

Aller vers ces pays imaginaires, au-delà du rivage et du mirage de mes rêves, décrits en mal par ceux qui s’y sont déjà rendus et y vivent. J’irai par la mer, j’irai par le ciel, j’irai par le désert…j’irai…loin de la tourmente orchestrée, de la fausse misère entretenue et imposée.

Soundiata Keita! Je veux partir puisque ta charte, la charte du Mandé, charte de Kouroukan Fouga, plagiée, adoptée et embellie le 10 décembre 1948 à Paris au palais de Chaillot, ne nous protège toujours pas. Des comploteurs égoïstes aux colliers en or sertis de diamants, aux tabliers en dentelle, supposés gardiens des valeurs et de la morale universelle, ne font que la violer et observent avec bénédiction leurs valets africains faire de même.

Moïse, toi le prophète de Dieu, prophète du peuple affamé et réduit en esclavage, prépare-toi à étendre à nouveau ta main sur la mer. Ne nous laisse pas périr au fond de l’océan, toi le bébé miraculé du grand fleuve ne laisse aucun enfant africain nourrir les poissons des fonds coralliens. Frère d’Aaron, entend et écoute la détresse et les supplications des enfants engloutis par l’océan, ne sont-ils pas eux aussi du peuple de Dieu ? Pourquoi les confondre avec ceux de l’armée du pharaon ?

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Rescapé par miracle, lorsque je serai de l’autre côté, à destination, mes yeux s’ouvriront et je réaliserai que nous avons le Nil, le Congo, le Niger, le Zambèze, le fleuve Orange, que nous avons le fleuve Sénégal capables d’arroser des milliers et des milliers d’hectares encore non exploités.

Et voici que ma conscience me rappellera que j’ai laissé derrière moi, par angoisse et lâcheté, au profit du prince-tyran, de sa famille et ses amis-ennemis : pétrole, uranium, charbon, manganèse, bauxite, coltan, phosphate, calcaire, diamants, or, nickel, platine, cuivre, zinc, plomb…

Alors, tel l’enfant prodigue, je dirai que rien ne manque au jardin de mon père. Déçu, je regretterai, l’investissement perdu de mes tantes, oncles et parents.

«Eh mba», je n’oublierai pas les nuits de grandes tristesses et d’inquiétude dans le désert, la peur au quotidien, les humiliations et ma mise à prix au pays d’Omar Makhtar. Je me dirai pourquoi n’ai-je pas investi au bord du grand lac, pourquoi n’ai-je pas exploité mes terres, ceux que je rejoins en occident font le chemin inverse pour exploiter mon héritage.

Pourquoi affronter les tempêtes de l’océan, les ordres barbares du Sahara ? Une telle bravoure devrait être utilisée pour destituer les mauvais mansas. Ma décision est prise : je m’allierai à mes frères et sœurs de sort pour combattre le Président-Roi-Dictateur et ses alliés diaboliques.

Que les anges-gardiens de la mémoire des martyrs nous foudroient sans pitié et pour l’éternité si nous continuons à nous réfugier lâchement sous la coquille du silence coupable. Que les paysans, grands révoltés de l’Ouest du Niger, nous maudissent et nous renient à jamais. Que les esprits de Gbêhanzin roi d’Abomey, de l’Almamy Samory Touré, de Ruben Um Nyobè le Mpodol, Patrice Emery Lumumba le sacrifié, Benjamin Moloise le poète, Stephen Bantu Biko, Nelson Madiba Mandela le patient, Amílcar Lopes da Costa Cabral, Thomas Sankara l’enfant de Yako, d’Oumar Blondin Diop, l’agneau du sacrifice perpétré le 11 mai 1973, nous accusent et nous trainent devant le tribunal de notre conscience.

Que dirons-nous à Taytu Betul fondatrice d’Addis-Abeba, elle qui repoussa l’envahisseur italien, à Anne Zingha, reine du Ndongo, icône de la résistance à l’impérialisme portugais, à Kimpa Vita, elle qui fut brûlée vive sur un bûcher, aux féroces amazones qui offrirent aux soldats français leur pire surprise le 26 octobre 1892, à Aline Sitoé Diatta la reine du Cabrousse…

Que les Présidents atteints de folie suicidaire, docteurs-tricheurs, diplômés Es modification constitutionnelle, rêveurs de mandats sans fin, préparent leurs baluchons. Le peuple souverain est en ordre de marche pour reprendre ce qui lui appartient de droit.

Émirs poussiéreux, corrompus et épineux, le peuple vous redit que vous n’êtes ni éternels, ni invulnérables.Dieu bénisse l’Afrique !

Marcel Monteil marcelmonteil@gmail.com

« Le mandat du chaos » Marcel A. Monteil
       

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