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CHRONIQUES

SÉNÉGAL : Péril du Covid-19 : Pourquoi faut-il effacer la dette de l’Afrique ? Par Abdou Latif COULIBALY.

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L’idée d’effacement de la dette africaine, à peine lancée par le président de la république du Sénégal, a fait débat et, continue d’en faire, au-delà des frontières africaines. L’appel en question fait, naturellement, débat en ce qu’il questionne une sempiternelle problématique : comment, à défaut de pouvoir changer le pernicieux ordre économique mondial, le rendre moins affligeant pour une plus grande partie de l’humanité, en particulier pour les populations du Sud, en mettant en place des mécanismes de solidarité minimale entre le peuples. Cette exigence est aujourd’hui rendue davantage plus indispensable par la crise économique procédant de la pandémie du Covid-19.

Certains s’interrogent sur la légitimité et sur la faisabilité technique de la nouvelle demande qui ne concerne en réalité que 365 milliards de dollars US. Des sommes dues au titre de la dette publique. Autant dire tout de suite, peu de choses est demandé, au regard des sommes astronomiques payées chaque année aux créanciers par les pays du Tiers monde, en remboursement de capitaux prêtés et d’intérêts divers.

Effacement de dettes
Effacement de dettes, un heureux précédent international
En tout état de cause, cet appel lancé par le Sénégal ne manque pas d’intérêt. Au-delà de la personne qui en a eu l’initiative, la demande réjouit en Afrique, car les discussions qu’elle suscite permettent d’éclairer le monde, en ce qu’elles sont susceptibles d’expliquer les effets bénéfiques qu’une telle mesure pourrait avoir sur les faibles économies de nos pays en ces temps de crise. Et l’on comprend mieux l’idée ainsi exprimée, dès lors que l’on met en parallèle cette nouvelle demande formulée par le Sénégal avec un précédent effacement de dettes qui avait été initié au début de la première décennie des années 2000. Nous parlons, ici, de l’initiative PPTE (Pays Pauvres Très Endettés). Comme la précédente initiative (PPTE), cette nouvelle demande émise par le Sénégal pourrait, entre autres, constituer, dès lors que la communauté internationale accepte de l’endosser, un puissant levier de refondation des économies africaines qui sont du reste durement frappées par cette pandémie du Covid-19. En quoi faisant ? Comme en écho à l’initiative du Sénégal, le FMI a déjà annoncé un allégement de dettes qui n’est certes pas un effacement. Ainsi, de nombreuses personnes, à travers le monde et même en Afrique doutent que l’appel de Dakar soit suivi d’effets, au-delà de l’accueil favorable que lui réserve Sa Sainteté le Pape François et le Chef de l’Etat français qui l’a également préconisé. Ceux qui doutent ainsi considèrent que l’annonce faite par le Fonds monétaire international (FMI), préconisant l’allégement de la dette de quinze pays africains, est une nette indication quant à la position définitive de la communauté financière internationale, comme réponse apportée à l’appel du Chef de l’Etat sénégalais. Il semble pourtant, à en croire, du moins, des sources proches des milieux financiers internationaux, que la position affichée par le Fonds Monétaire International (FMI) est une mesure conservatoire pour parer au plus pressé, face au pire qui pourrait résulter d’une inaction totale. Il s’agirait pour le FMI d’une réaction d’attente, préalable pour engager l’élaboration d’une stratégie globale, mieux pensée et plus adaptée à une crise économique sans précédent, depuis la crise de 1929.

La crise de 1929
Rappelons que cette crise de 1929 avait produit dans certains pays d’Europe, comme l’Allemagne et l’Italie, des régimes ultranationalistes et fascistes qui ont été à la base de la deuxième guerre mondiale. En rappelant cela, on attire en même temps l’attention des uns et des autres sur les risques – qui sont peut-être de toute autre nature, mais qui n’en sont pas moins périlleux que ceux des années 20 -, pour l’humanité. Si jamais les égoïsmes nationaux, étroits, fossoyeurs de l’esprit de solidarité internationale, résultant en particulier de l’attitude des pays les plus développés du monde, empêchent de voir et de comprendre que le péril actuel, du fait de la mondialisation des économies, est autrement plus complexe et plus grave que la crise qui a frappé le monde, il y a 90 ans (1929) et à laquelle nous faisions tantôt référence.

La communauté internationale devrait penser à réactiver les mécanismes de l’initiative PPTE
Au regard de ce qui vient d’être dit, nous pensons que la communauté internationale devrait penser à réactiver les mécanismes de l’initiative PPTE qui avait bénéficié aux pays très pauvres et surendettés. Rebaptisée autrement mais conservant tout de même sa finalité. Cette initiative avait permis de venir en aide à une cinquantaine de pays -les plus faibles et les plus endettés de la planète-, dont trente-cinq (35) nations africaines. Pour mieux comprendre ce que nous avançons, il me semble indiqué de convoquer la teneur de l’opération d’effacement de dettes qui avait été mise en œuvre, sous l’égide des pays développés du G20 qui ont été vite rejoints dans l’initiative par le FMI et le groupe de la Banque Mondiale (BM), ainsi que par la Banque Africaine de Développement (BAD). A l’époque, quand les États sous-développés, au sein desquels les pays africains jouaient un rôle très actif, avaient formulé une demande pressante d’effacement de leurs dettes, les pays du G20 avaient, après un long moment d’hésitation, répondu positivement pour le principe. Ils avaient toutefois décidé, du point de vue de la mise en pratique de la mesure accordée, de définir une méthodologie assortie d’un mécanisme opérationnel très rigoureux. Cette méthodologie et son mécanisme opérationnel obligeaient chaque pays désireux d’en être bénéficiaire, d’engager des réformes, pour ne pas dire des politiques d’assainissement économique et de mise en œuvre de procédures de transparence et de bonne gouvernance. Toutes mesures tendant à rendre plus efficaces et plus efficientes les politiques publiques de chaque État éligible à l’initiative PPTE.

« Aucune Banque centrale d’un pays sous-développé, encore moins celles de l’Afrique, ne peut, à l’image de ce que font la Réserve fédérale américaine (FED) ou la Banque centrale de l’UE (BCE), faire jouer la planche à billets, en créant massivement de la monnaie pour venir au secours des États. »

Le sommet du G20 à Lyon en 1996
Lors du sommet du G20 tenu à Lyon en 1996, les pays riches, sous la pression des organisations de la société civile, avaient lancé l’initiative en faveur des PPTE. Cette mesure visait comme les précédentes, à soulager les finances des pays bénéficiaires en leur permettant d’économiser des ressources pour soutenir leur développement. Moment ne peut s’avérer plus opportun pour réinventer un tel mécanisme dans le contexte de crise née de cette pandémie du Covid-19 sévissant de façon dramatique et qui n’a pas encore fini de compromettre chaque jour le fonctionnement de toutes les économies du monde. En estimation grossière, en attendant que des évaluations plus rigoureuses soient faites, notre pays pourrait perdre rien qu’en recettes douanières la bagatelle de 200 à 300 milliards de FCFA. Ce manque à gagner pourrait être circonscrit dans cette fourchette à condition, toutefois, que la crise n’excède pas trois mois. Sans compter toutes les remises fiscales évaluées à un peu plus de 200 milliards FCFA, qui sont concédées par l’Etat aux entreprises, pour sauver des emplois et pour éviter une faillite tous azimut de celles-ci. Autant de ressources perdues par l’Etat entraînant un affaiblissement considérable de ses Finances publiques.

l’Afrique ne dispose que du seul levier budgétaire.
Aucune Banque centrale d’un pays sous-développé, encore moins celles de l’Afrique, ne peut, à l’image de ce que font la Réserve fédérale américaine (FED) ou la Banque centrale de l’UE (BCE), faire jouer la planche à billets, en créant massivement de la monnaie pour venir au secours des États. Pour rappel, les institutions financières européennes en particulier la BCE, a dégagé en faveur des pays membres de la zone euro une aide arrêtée à 500 milliards d’euros. Sans compter les interventions internes des États se chiffrant à des centaines de milliards également. Certains pays, foulant allègrement au pied les limites des déficits budgétaires établis par une règle de principe de l’Union quasi immuable à 3% du PIB. Un pays comme la France a explosé le plafond de son déficit, mais d’autres membres de l‘UE l’ont également fait. Ils l’ont tous fait, à bon escient, pour la survie de leur économie, sans aucune conséquence pour eux. C’est ce qui a permis à la France de mettre sur la table 300 milliards d’euros, sans compter la garantie de prêts accordée à ses entreprises, pour un plafond de couverture d’un montant de 100 milliards. Là où les États développés du monde peuvent compter sur une panoplie de leviers pour assurer la sauvegarde de leurs économies, l’Afrique, elle, à l’image de l’ensemble des pays sous-développés, ne dispose, à cet effet, que du seul levier budgétaire.

Une nouvelle initiative PPTE est obligatoire
Ainsi, il va s’en dire donc, qu’au regard de la solidarité internationale imposée par la crise, nous pensons qu’une nouvelle initiative PPTE est non seulement pertinente, mais qu’elle est obligatoire dans le contexte actuel, pour tous ceux qui pensent que l’humanité est une et indivisible. On ne peut pas se contenter de sauvegarder une partie de celle-ci et laisser la majorité périr, en étant doublement victime. Une nouvelle initiative PPTE est d’autant bienvenue dans son principe, que celle qui a été déroulée, il y a quelques années, comportait une innovation majeure qui en faisait plus qu’un simple mécanisme d’effacement de dettes. Elle s’est révélée aux yeux du monde comme un puissant levier économique, dans la mesure où les pays pauvres qui voulaient en bénéficier étaient obligés de verser les sommes à rembourser aux prêteurs dans un compte séquestre ouvert dans les livres de leur banque centrale pendant une certaine période. Conçu comme un formidable instrument de collecte de fonds, en vue d’assurer des investissements cruciaux, la mise en place d’un nouveau mécanisme d’effacement de dettes élaboré au regard du contexte actuel, avec quelques changements apportés au système, comparativement à celui du début des années 2000, est à la fois souhaitée et vivement attendue en Afrique. Dans le moyen et long terme, ce mécanisme pourrait être un excellent outil de promotion, pour un temps limité, du développement.

« La pandémie du Covid-19 est un cas de force majeure, un péril imprévisible qui pulvérise tous les engagements économiques ainsi que les bons points de croissance engrangés ces dernières années. Que signifie encore la vie des êtres humains sur terre, face au drame imposé par le Convid-19 ? »

l’Etat du Sénégal était parvenu au point d’achèvement
Avec le précédent, les ressources déposées par les États leur étaient réallouées pour financer les secteurs sociaux notamment la santé et l’éducation. Rétrospectivement, l’on constate, qu’à compter de l’année 2006, l’Etat du Sénégal était parvenu au point d’achèvement. On se rappelle l’ancien Premier ministre Idrissa SECK se félicitant, à juste titre, d’avoir conduit avec succès toute la procédure ayant abouti au point d’achèvement de son pays qui lui donnait ainsi le droit d’accéder directement à l’effacement de sa dette publique. Le philosophe et professeur émérite d’économie, notre compatriote François BOYE, n’avait pas manqué de railler la déclaration de satisfaction de l’ancien Premier ministre. Il se demandait comment un pays pouvait se glorifier d’atteindre le point d’achèvement fixé par ses bailleurs, en soulignant que cela ne devait et ne pouvait, en aucune façon, être considéré comme une prouesse économique. En tout état de cause, le pays avait réussi par le mécanisme PPTE à déposer un peu plus de 600 milliards de FCFA dans le compte ouvert, à cet effet, dans les livres de la BCEAO. Il y était parvenu avec une moyenne du service mensuel de sa dette publique estimée à l’époque à 67 milliards de FCFA. En ayant obtenu auprès de ses bailleurs une réallocation de cette somme déposée à la BCEAO, le Sénégal en avait fait usage pour investir massivement dans la construction d’écoles et le recrutement d’enseignants, mais aussi dans la construction d’hôpitaux et de Centres de santé à travers le pays. Quand nous disions, plus haut, que le groupe de la Banque mondiale et le FMI, ainsi que la BAD avaient rejoint dans l’initiative le club du G7, c’est que celle-ci avait été plus tard complétée par l’initiative d’allégement de la dette multilatérale (IADM), qui a permis l’effacement de la dette des pays concernés vis-à-vis de ces trois institutions financières en 2005.

17 pays africains éligibles ont pu disposer de centaines de milliards de FCFA pour réduire la pauvreté
17 pays africains éligibles ont pu disposer de centaines de milliards de FCFA pour réduire la pauvreté à travers un programme consigné dans les Documents de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP). Parmi les conditionnalités, les bénéficiaires devaient s’astreindre à limiter toute perspective de nouveau surendettement. Pour la majorité des pays bénéficiaires, le niveau actuel de la dette reste soutenable même si un nouvel effacement aiderait à mobiliser de nouvelles ressources pour combattre les effets de la pandémie du coronavirus. Sauf que, par ailleurs, ce prétexte de la soutenabilité de la dette actuelle, ainsi que l’engagement précédent des pays qui avaient souscrit l’initiative PPTE à ne pas demander une nouvelle initiative d’effacement, brandis comme arguments pour s’opposer à l’appel de Dakar, ne sauraient tenir la route.

La pandémie du Covid-19
La pandémie du Covid-19 est un cas de force majeure, un péril imprévisible qui pulvérise tous les engagements économiques ainsi que les bons points de croissance engrangés ces dernières années. Que signifie encore la vie des êtres humains sur terre, face au drame imposé par le Convid-19 ? Que valent surtout tous les engagements économiques antérieurement souscrits, procédant souvent d’un ordre mondial bâti à partir d’une idéologie libérale forcenée, reposant essentiellement sur l’idée d’une mondialisation se jouant de l’essence même de l’homme : son humanisme et sa dignité ? Toutes valeurs qui se trouvent en permanence sacrifiées sur l’autel d’une accumulation déshumanisante de profits financiers et de biens matériels. Comment procéder, dès lors que l’on accède à la demande d’effacement de la dette de l’Afrique ? On pourrait y parvenir, en tenant compte du contexte actuel, en améliorant le processus et le mécanisme, mais en raccourcissant surtout les délais, de la méthode d’effacement appliquée au début des années 2000. Celle-ci, nous semble-t-il, est bien appropriée à cette fin. Nous considérons, pour notre part, que le Covid19 est, sans aucun doute, une immense tragédie pour l’humanité et pour l’Afrique, en particulier. Paradoxalement, celle-ci pourrait pourtant se révéler comme une vraie chance ouverte aux économies africaines. Ainsi, pour parler comme l’économiste sénégalais Felwin Sarr, cette pandémie offre au continent noir une réelle occasion pour engager un travail en profondeur d’une sérieuse et totale refondation de son économie.

Par Abdou Latif Coulibaly Ministre, porte-parole de la Présidence de la République, ancien Ministre de la Culture, Éditorialiste réputé, journaliste d’investigation reconnu.

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CHRONIQUES

CÔTE D’IVOIRE- MUSIQUE : Quel avenir pour le couper décaler après la mort de Dj Arafat ?

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La nuit du 11 au 12 Août 2019 restera dans l’histoire de la musique ivoirienne, marquée d’un triste sceau. Houon Ange Didier plus connu sous le pseudonyme de DJ Arafat, donnait tragiquement son âme à Dieu, à la suite d’un accident de moto. La triste nouvelle a bouleversé le monde entier tant l’homme était d’un charisme et d’une aura exceptionnels.

Fils de Houon Pierre et de Tina Glamour, eux-mêmes artistes, DJ Arafat déposait le micro dans la fleur de l’âge. Une trentaine d’années de vie ! Il est parti alors que la gloire et la célébrité lui ouvraient les bras, laissant ses milliers de fans dits les Chinois dans la désolation. 

Sao Tao le dictateur, Beerus Sama, Commandant Zabra, Influenmento, Yorobo…, DJ Arafat, l’homme aux surnoms multiples était le maître du Couper Décaler, cette musique mise en marche dans les années 2000 par l’Ivoirien Douk Saga et sa bande d’amis jet-setteurs. Avec sa gouaille presqu’irrévérencieuse, DJ Arafat régnait sur cette musique. Provocateur à souhait, il n’hésitait pas à s’attaquer aux autres grosses têtes du milieu à travers des vidéos parfois virulentes. Ces sorties qui stimulaient la concurrence avaient fait du Couper Décaler la musique urbaine la plus en vogue en Côte d’Ivoire.

Crédit photo : Page facebook Arafat

Aujourd’hui, cette musique marque le pas. L’héritage du Daïshikan DJ Arafat est sûrement lourd à porter. Debordo Leekunfa et Serge Beynaud qui maintenaient le rythme aux côtés de l’idole des  » chinois  » s’essouflent. L’absence de DJ Arafat se ressent encore. Et c’est malheureusement tout l’avenir du Couper Décaler qui s’écroule. Si Kédjévara le Météormane, Debordo et Serge Beynaud tentent de le maintenir à flots à travers des singles sporadiques, leurs efforts sont bien insuffisants. Le guide manque véritablement à l’appel. 

Signe des temps. C’est le Rap Ivoire qui a conquis le cœur de la jeunesse ivoirienne. KS Bloom, Suspect 95, Didi B, Elown Kiff No Beat et d’autres rappeurs planent sur le showbiz ivoirien. 

Hélas,  » ce que la mort touche ne se réchauffe plus aux foyers d’ici-bas”. 

DJ Arafat est parti. Il a fait sa part. Aux vivants de tenir la flamme du Couper Décaler vive ! Au travail, chers  » Couper Décaleurs  » ! 

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SÉNÉGAL – « L’insurrection sera télévisée » par Pierre Sané

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Qui aurait pu imaginer que le Sénégal de « l’émergence » allait accoucher d’un régime de tyrannie ? L’appât est tout simplement la présidence à vie. Le Pastef n’est que la face émergée d’un peuple qui gronde de colère. Par Pierre Sané SenePlus

Appel à l’insurrection ?

Soyons sérieux !

L’insurrection ne saurait être attribuée à tel ou tel acteur politique. Non. Ce qui déclenche l’insurrection c’est la tyrannie.

L’insurrection c’est comme quand un système immunitaire sain produit des anticorps lorsqu’attaqué par un virus malsain et malveillant. Plus le système immunitaire est sain (cohésion sociale, solidarité, résilience, spiritualité …) et plus la réaction est ferme et sans équivoque. Pour une démocratie, c’est une réaction de survie. Il suffit de lire les livres d’histoire ou mieux de relire le préambule de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 : « Considérant qu’il est essentiel que les Droits de l’Homme soient protégés par un régime de droit, pour que l’Homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l’oppression… »

Nul besoin d’un soi-disant « appel ».

La tyrannie par contre est un projet politique, particulièrement malsain et malveillant. Pouvons-nous « apprendre à vivre avec un tel virus » ? Bien sûr que non !

Devons-nous le faire ? Hors de question !

Il faut s’en débarrasser.

Qui aurait pu imaginer que le Sénégal de « l’émergence » allait accoucher d’un régime de tyrannie ?

Tout d’abord la définition d’un tyran (de l’indispensable Wikipédia) : “La nature du pouvoir tyrannique se reconnaît en effet à ce que le tyran, sans abolir les lois, se place au-dessus d’elles. La perversion de ce régime tient aussi au fait que « la tyrannie cumule les vices de la démocratie et ceux de l’oligarchie », en raison de l’amour du tyran pour les richesses et de son hostilité à l’égard du peuple qu’il désarme et asservit. La tyrannie est le pouvoir arbitraire et absolu d’un souverain, d’une personne ou d’un groupe de personnes détenant l’autorité suprême, caractérisé par un gouvernement d’oppression et d’injustice”

Macky Sall est-il un tyran en devenir ?

« Je réduirai l’opposition à sa plus simple expression. » (et non pas je réunirai toute la nation dans sa diversité).

Voilà le programme politique que le président sénégalais Macky Sall avait dévoilé à ses concitoyens lors d’une conférence de presse à Kaffrine le 16 avril 2015. Ce jour-là Macky Sall avait rendu publique sa détermination à mener une guerre sans merci contre la démocratie.

Quand j’ai pris connaissance de ce prononcé, je n’en revenais pas. J’étais hors du pays. Des amis et camarades internationalistes de Turquie, Irlande, Kenya, Côte d’Ivoire et autres m’ont appelé pour confirmer que cela venait bien de la bouche du président de la République du Sénégal, une République constitutionnalisée comme étant démocratique laïque et sociale depuis 60 ans. Et qui dans son article 58 « garantit aux partis politiques qui s’opposent à la politique du gouvernement le droit de s’opposer ».

Sénégal ? Une démocratie en construction leur avais-je toujours dit.

Mais, me répondent-ils, « Macky Sall  contrôle le législatif, le pouvoir judiciaire ; il est Premier ministre, il nomme tous ses conseillers constitutionnels, il commande l’armée, il fait ce qu’il veut de votre argent y compris acheter le train le plus cher au monde (train français bien entendu).Il décide de la composition des listes de candidats députés de sa coalition, désigne les têtes de liste des élections locales, écrit la Constitution, change les règles du jeu avant les élections, choisit ses adversaires aux élections, s’attribue le rôle de maître des poursuites, dispose de l’administration.. Et … décide de la couleur des bus ! » (marron-beige bien sûr).

« Pierre, peux-tu toujours après tout ça nous abreuver de l’exception démocratique sénégalaise ? »

Piteusement, je réponds : au moins nous n’avons jamais eu de coups d’État.

« Ah ouais ? Votre président-poète n’a-t-il pas orchestré le premier coup d’État de l’Afrique indépendante contre le président du Conseil des ministres, en 1962, truquant son procès et le condamnant à la prison à perpétuité (Mamadou Dia) ? »

Revenant à la charge au sujet de Macky Sall, ils me disent (ils deviennent impitoyables) :

« Réduire à sa plus simple expression ?

Les dictionnaires nous en donnent une liste de synonymes : soumettre, anéantir, détruire, briser, vaincre, obliger, subjuguer, dompter, broyer, abattre, asservir, concasser, consumer, déchiqueter, acculer, recroqueviller. 

Relis la liste ci-dessus et tu t’apercevras comment elle capture tous les actes posés par le président Macky Sall contre l’opposition depuis mars 2012. »

En effet, la guerre contre la démocratie s’est intensifiée.

Déjà, après avoir décroché Idrissa Seck, il plastronnait qu’il réunissait désormais 85% de l’électorat. Et maintenant que fait-il ? Il cherche à étouffer les porte-voix des 15% restants. Quinze pour cent de plus et il peut devenir monarque et tyran.

Ainsi, Macky Sall ambitionne de s’octroyer littéralement tous les pouvoirs sans contre-pouvoirs et sans opposition.

Mais bien entendu, il manquera l’essentiel des pouvoirs, l’élément clé, à savoir le pouvoir souverain de battre sa propre monnaie, de superviser les banques et de décider du montant de la masse monétaire en circulation ainsi que des taux d’intérêt. Ceci, afin de pouvoir mener des politiques de développement équitable, créer une véritable économie et mettre fin à la pauvreté.

Car ce pouvoir appartient au Gouverneur de la Banque Centrale (BCEAO) dont le vrai patron est Bruno Lemaire, ministre français des Finances. Si Macky Sall est un vrai « guerrier » qu’il aille donc décrocher ce trophée. Rien de plus facile que d’être courageux lorsqu’on a les fusils et les balles face à des gosses armés de cailloux. Mais face au maître, on courbe l’échine ! Asservissement, quand tu nous tiens.

C’est pourquoi Macky Sall ne sera toujours qu’un tyran par délégation avec la latitude toutefois d’imposer par la force et la violence la perpétuation de son séjour au pouvoir. L’appât est tout simplement la présidence à vie.

Or nous savons tous que si vous conjuguez présidence à vie avec pétrole et gaz le désastre s’installe : guerres, corruption généralisée, pauvreté, inégalités, répression tous azimuts népotisme. Il suffit de jeter un regard autour de nous : Gabon, Congo, Tchad, Cameroun, Guinée équatoriale… C’est pourquoi tous ces amis m’appellent : « Le Sénégal ne doit pas rejoindre ce club. »

Le Sénégal ne mérite pas ce destin et ne l’acceptera pas. Quant á la volonté manifeste de briser l’élan de Pastef ? C’est peine perdue parce que Pastef, ce n’est que la face émergée d’un peuple qui gronde de colère.

Macky Sall a commis l’erreur de confondre résultats d’une élection controversée avec le peuple debout.

S’il ne retient pas la leçon et persiste dans ses errements alors oui l’insurrection sera au rendez-vous et elle sera télévisée. Nul besoin d’un quelconque «appel».

Par contre, il serait instructif de passer un coup de fil à Blaise Compaoré.

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A LA UNE

SÉNÉGAL : Affaire « Sweet Beauté », une démocratie souillée, Par l’éditorialiste de SenePlus Boubacar Boris Diop

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Le paradoxe des événements en cours, c’est que tout en étant graves, ils ont l’allure d’une farce grotesque. Le sentiment que Macky Sall ne se fixe aucune limite est inquiétant. Réagir à chaud est rarement une bonne idée. On peut comprendre que, dans le feu de l’action, les politiques y soient contraints quasi tout le temps : d’une certaine manière, le moindre doute peut leur être fatal. Mais aujourd’hui, avec l’affaire du « Sweet Beauté », l’éthique républicaine est à ce point tournée en ridicule que l’urgence de sonner l’alerte s’impose également, et de toute urgence, à tous. Par Boubacar Boris Diop

Le paradoxe des événements en cours, c’est que tout en étant graves, ils ont l’allure d’une farce grotesque. Ainsi donc, l’homme le plus surveillé du Sénégal, si méfiant qu’il ne fait jamais enregistrer de valise en soute lors de ses voyages en avion, aurait choisi un lieu public pour violer, les armes à la main, une jeune masseuse de 21 ans. Cette dernière déclare avoir été sexuellement abusée à plusieurs reprises dans cet endroit où sont installées, nous dit-on, des caméras de surveillance. Mais surtout, pas une seule fois l’on n’a entendu l’accusatrice du leader de Pastef appeler au secours ou se débattre pour mettre fin à son « calvaire ». Après tout, les faits incriminés sont supposés s’être déroulés dans une maison qui n’a pas l’air bien grande et où vivent une dizaine de personnes, dont la famille de la propriétaire du Sweet Beauté.

Heureusement pour Sonko, les apprentis-sorciers à l’esprit un peu dérangé n’avaient pas prévu que cette dernière n’entrerait pas dans leur jeu. Sa prise de parole, d’une remarquable clarté, a bien montré que des gens cyniques tapis dans l’ombre ont exploité l’inexpérience – pour ne pas parler de fragilité psychologique d’Adja Raby Sarr – et sa détresse financière, pour détruire un homme davantage perçu comme un ennemi mortel que comme un simple adversaire politique.

Le comble de l’amateurisme a été de s’imaginer que, dans notre pays tel qu’il va, une telle affaire pouvait rester strictement privée. Il a suffi de quelques heures pour qu’elle se politise au point de reléguer au second plan tous les autres sujets de la vie nationale, y compris une pandémie chaque jour un peu plus meurtrière. La polarisation, dans un contexte de sourd mécontentement populaire, se fait bien évidemment au détriment du régime de Macky Sall. On ne voit pas avec un si mauvais départ par quel miracle ses hommes de main pourraient convaincre qui que ce soit de la culpabilité de Sonko. De toute façon, quelles que soient leurs prétendues preuves, elles seront rejetées avec mépris par le tribunal de l’opinion, le seul qui vaille dans un pays démocratique. Il n’est pas non plus besoin d’être un partisan de Sonko pour deviner que le leader de Pastef sortira poliquement renforcé de cette épreuve. Les soutiens qui convergent de toutes parts vers lui ne vont pas peu contribuer à le légitimer comme figure politique majeure. Jusqu’ici son importance politique tenait surtout à l’élan d’une jeunesse qui en avait fait le dépositaire de ses espérances. Le voilà qui prend, peut-être plus tôt que prévu, l’épaisseur d’un acteur incontournable de la scène publique.   

Mais en ces heures de forte tension sociale, ce qui se joue va bien au-delà du destin politique de telle ou telle individualité. Il s’agit ici de la dignité de la démocratie sénégalaise dont les valeurs sont si joyeusement foulées au pied. En vérité ceux qui auraient dû la protéger sont tout simplement en train de la souiller. Aucune obscénité ou bizarrerie ne manque à l’appel : il est question d’une femme violée, bien réelle mais devenue un fantôme aussitôt sa plainte déposée ; du sperme d’un honnête père de famille – oublions un instant l’homme politique – convoyé nuitamment, paraît-il, vers un laboratoire ; d’une propriétaire de salon de massage victime de torture morale et de tentative de corruption pour lui faire changer son témoignage ; d’un Procureur de la République, Bassirou Guèye, d’une docilité à toute épreuve vis-à-vis de l’autorité politique ; de la convocation parfaitement illégale du député Ousmane Sonko à la « Section de recherches », c’est-à-dire au mépris de son immunité parlementaire ; et, tout aussi illégalement, de l’encerclement de son domicile par des chars de combat.

Comme si tout cela ne suffisait pas, l’Assemblée nationale est convoquée ce jeudi 11 février 2021 pour le livrer à une justice que, chose aussi triste que terrible, les justiciables ne prennent plus au sérieux. 

La totale emprise de l’Exécutif sur le Judiciaire et sur le Législatif montre que dans ce pays, tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains d’un seul homme, le président de la République. Ces institutions sont censées constituer un triangle mais celui-ci est d’un genre bien particulier en ce sens qu’il n’a qu’un côté.

Le Sénégal n’est pas pour autant l’affreuse dictature que certains se plaignent à dépeindre et, de toute façon, ce présidentialisme envahissant n’est pas nouveau. Il n’a toutefois jamais été à la fois aussi dangereux et caricatural. Le sentiment que le président Macky Sall ne se fixe aucune limite est tout à fait inquiétant. En agissant d’une façon aussi cavalière, il montre le peu de cas qu’il fait non seulement du commun des Sénégalais mais aussi de ses alliés.

Ce dernier point mérite que l’on s’y arrête un instant.

Certains compagnons de route de Macky Sall sont connus et respectés pour s’être battus leur vie durant pour le progrès et la souveraineté du Sénégal. Qu’ils aient décidé à un moment donné de soutenir Macky Sall importe finalement peu : la vie politique réelle est faite de ces allers-retours et chassés-croisés, ce n’est que le délicieux chaos de la politique politicienne sous les Tropiques. Rien de bien méchant. Ce qui reste plus difficile à accepter, c’est que des intellectuels aussi clairvoyants et d’une grande force de caractère donnent aujourd’hui – du dehors tout au moins – l’impression d’être littéralement tétanisés face au chef de l’Etat. Dans une situation normale, celui-ci devrait pouvoir se dire de temps à autre qu’il existe une ligne rouge que certains de ses alliés, indépendamment de leur poids électoral, ne lui permettraient pas de franchir. La situation ubuesque que nous vivons depuis quelques jours est typique d’un pays où personne n’ose murmurer la moindre réserve à l’oreille du boss.  

Et ce n’est pas que personne n’en ait envie. Il se pourrait bien, en effet, que même dans son parti, des cadres et des militants, quelle que soit leur hostilité à Ousmane Sonko – on peut parfaitement la comprendre – soient embarrassés de voir leur leader se tirer si souvent une balle dans le pied.

Pour expliquer ses comportements erratiques, plusieurs précédents sont cités ces jours-ci, de Karim Wade à Aminata Touré, en passant par Khalifa Sall, tous soupçonnés de lorgner le fauteuil présidentiel, crime gravissime s’il en est. Quelqu’un aurait dû souffler au président que tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse. La maladroite tentative d’élimination de Sonko, vouée à l’échec, risque de le lui rappeler amèrement. Le leader de Pastef pourrait tirer profit du sentiment de plus en plus partagé que trop c’est trop.

Il est possible que les stratèges du pouvoir aient voulu, par cette provocation, tester les capacités de résistance de Pastef, s’assurer que, comme la propagande du régime le répète à l’envi, que ce n’est que « le parti des réseaux sociaux ». Le résultat a dû les décevoir : le Sénégal s’est retrouvé en très peu de temps dans une situation quasi insurrectionnelle non seulement dans certains quartiers dakarois mais aussi dans des villes comme Louga, Bignona, Mbour et Ziguinchor, cette liste étant fortement susceptible de s’allonger si l’on ne met pas fin au plus vite à cette pantalonnade. Last but not least, le début d’internationalisation à laquelle on assiste fait politiquement sens au vu de la côte d’amour de Pastef dans la diaspora.

En somme, cette expérience peu concluante devrait ramener Macky Sall à la raison. Elle lui donne surtout un désagréable avant-goût des sérieux obstacles qu’il lui faudra surmonter pour imposer une troisième candidature. Ce sera tout simplement mission impossible, même si les exemples de Ouattara et Condé pourraient l’inciter à s’entêter.

La seule chose que devrait faire Macky Sall, c’est de se résigner à l’idée que l’on ne peut pas mettre un pays à feu et à sang au prétexte de vouloir continuer à le diriger. Entre avril 1960 et cette année 2021, des dizaines de millions de fils du Sénégal y ont vécu et y vivent encore. Parmi eux, seuls quatre ont eu l’honneur d’en être le chef d’Etat. Des millions d’autres vivent très bien le fait de n’avoir jamais eu à présider un quelconque pays et beaucoup d’entre eux ne sont pas moins capables que Macky Sall. Bien au contraire…

Source : SenePlus / Par Boubacar Boris Diop / bdiop@seneplus.com

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