CULTURE
Bessora remporte le Prix Ahmadou Kourouma 2024 – Magazine Sénégal Njaay – Senegal-njaay.com

L’autrice Bessora a été distinguée par le Prix Kourouma pour son œuvre Vous, les ancêtres (éditions JC Lattès), lors d’une cérémonie qui s’est tenue le vendredi 8 mars à 18h30, au salon africain, dans le cadre du Salon du Livre de Genève, du 6 au 10 mars 2024. Ce prix, qui honore la mémoire de l’écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma, s’accompagne d’une dotation de 5000 francs suisses.
L’année dernière, c’est Beata Umubyeyi Mairesse qui avait remporté ce prix avec son roman Consolée (éditions Autrement). Vous, les ancêtres est un roman qui navigue entre la vérité historique et le réalisme magique, racontant l’histoire d’une femme, orpheline et boiteuse, réduite en esclavage, qui aspire à un avenir meilleur pour elle et les siens.
L’histoire débute en Cornouailles avec Jane, accusée de vol et déportée en Amérique en 1684, où elle devient esclave dans une plantation. Elle trouve espoir dans un verset biblique promettant une descendance puissante à une femme boiteuse. Des siècles plus tard, Johann, dans son pays, découvre un secret familial liant sa lignée à celle de boiteux qui, à travers les époques et les continents, cherchent à briser leurs chaînes invisibles.
Née à Bruxelles en 1968, Bessora a vécu en Europe, aux États-Unis et en Afrique. Après des études à l’HEC Lausanne et une carrière dans la finance internationale, elle se tourne vers l’anthropologie, étudiant les industries pétrolières au Gabon et soutenant sa thèse de doctorat.
Bessora a publié son premier roman, 53 cm, en 1999, suivi de plusieurs autres ouvrages récompensés et salués par la critique, dont Les Taches d’encre, Deux bébés et l’addition, Petroleum, et Cueillez-moi jolis messieurs…, ainsi que Cyr@no, Alpha : Abidjan-gare du Nord et Les Orphelins. Elle a aussi écrit des nouvelles, parmi lesquelles Le Cru et le Cuit et Les Compagnies Low-Cost. Vous, les ancêtres est son quatorzième roman, également lauréat du Prix suisse de Littérature 2024.
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A LA UNE
CÔTE D’IVOIRE – Ismaël Isaac : l’enfant de Treichtown au New Morning

Après une longue absence sur la scène internationale, Ismaël Isaac, celui qu’on surnomme le “Gangamba de Treich”, marque son retour, d’ailleurs, très attendu avec un concert le 21 février au New Morning à Paris. Avec ce concert, c’est un vent nouveau qui va souffler sur la planète reggae.
Une approche musical très “afro-optimiste”
Né en 1966 sous le nom de Kaba Diakité Issiaka, Ismaël Isaac fait partie des personnes qui ont contribué à mettre en lumière le mouvement en Côte d’Ivoire. Inspiré par Bob Marley, Ismaël Isaac s’est forgé une identité musicale en mêlant les sonorités jamaïcaines aux traditions mandingues. D’ailleurs, une grande partie de son répertoire est en dioula. Ce mélange de reggae pur, de roots jamaïcain, et de rythmes africains font de lui un spécimen musical unique. En plus de ce style de musique qui lui est très particulier, et contrairement à d’autres figures du reggae, Ismaël Isaac possède une voix mélodieuse et un sens aigu de l’harmonie vocale. Dans chacun de ses albums, il se fait le porteur d’un message de paix et de justice sociale à travers des titres devenus incontournables, comme “Goodbye Apartheid”, “Tientigui”, “Magnou Mako” ou encore “Lampedusa”.
Les débuts de l’enfant de Treichville
Cette soirée s’annonce comme un moment clé dans la carrière d’Ismaël Isaac. C’est un nouveau souffle pour cet artiste et le destin rime avec persévérance. Atteint de la poliomyélite, il va trouver la force de s’accrocher à la vie sur les danses des smurfers américains. Paradoxal non ! Contre l’avis de ses parents, Ismaël Isaac ne veut faire que la musique. Au début des années 80, une véritable révolution musicale s’opère en Côte d’Ivoire : le reggae s’impose avec la disparition de Bob Marley, d’autant plus qu’on observe l’ascension fulgurante d’Alpha Blondy lors de l’émission Première Chance de Roger Fulgence Kassy. Fasciné par cet artiste qui chante en dioula et arbore un nom de scène percutant, il comprend qu’il doit lui aussi se forger une identité musicale forte. C’est alors que Kaba Diakité Issiaka va devenir Ismaël Isaac. Voulant se faire entendre par tous les moyens, il multiplie les démarches auprès des plateaux de la télévision ivoirienne jusqu’au jour où la chance lui sourit. Georges Kouakou, clavier et arrangeur de la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI), séduit par sa voix, le présente à Roger Fulgence Kassy. Ce dernier le programme dans son émission. La carrière du jeune artiste est lancée.
Une discographie longue comme “The Rise and Fall of Bossanova” de Michael J Bostwick
Dès son premier passage à l’émission de Roger Fulgence Kassy, faiseur de stars à l’époque, la carrière artiste d’Ismaël Isaac Ismaël Isaac est sur des chapeaux de roues. Avec ses premiers succès “Liberté” et “Tchilaba” (1986), suivis de “Yatiman” (1989), le nom d’Ismaël Isaac est sur toutes les lèvres à l’époque. Mais c’est véritablement avec “Rahman” (1990) qu’il franchit un cap. En effet, cet album, produit par Ibrahima Sylla et arrangé par Moctar Wurie et Boncana Maïga, marque son entrée sur la scène internationale et le mène jusqu’en France, où il signe avec le prestigieux label Island Records. “Taxi Jump” (1993) va confirmer son statut. Avec cette production de haut vol, encadrée par le légendaire ingénieur du son Godwin Logie et une pléiade de musiciens renommés, il se murmure que l’artiste est en passe de voler la vedette à Alpha Blondy. Pourtant l’artiste continue les collaborations. En 1997, il revient avec Treich Feeling (1997). Un album sur lequel des arrangeurs de renom comme Georges Kouakou, Moctar Wurie et Cheick Tidiane Seck ont collaboré. Quand il sort en 2000 “Black System” chez Syllart, on sent que son reggae s’est enrichi de nouvelles influences. Après plusieurs années de silence, il revient en 2014 avec “Je Reste”, comme pour contredire ceux qui l’avaient déjà enterrée. Dans cet album, il réaffirme son engagement et sa volonté de faire résonner la voix du reggae africain à travers le monde.
Le concert du 21 février, un revival mémorable
Le 21 février, le New Morning résonnera aux rythmes envoûtants du reggae ivoirien. Ce concert sera la célébration d’une des figures emblématiques du reggae africain. Le retour d’Ismaël Isaac au New Morning est un événement que les amateurs de reggae ne voudront pas manquer. Véritable ambassadeur de la musique engagée, il promet une prestation intense et vibrante, portée par des décennies de passion et de combats. Ce concert marque non seulement son grand retour sur la scène internationale, mais aussi une nouvelle étape dans une carrière qui a traversé les générations et les frontières.
A LA UNE
MALI – Pari réussi ! Sidiki Diabaté casse La Défense Arena

Pas besoin de passer au crible les statistiques d’écoute en ligne pour connaître la profondeur du bassin de popularité de Sidiki Diabaté à Paris, il fallait juste se trouver, à son concert, le samedi 8 février 2025, à La Défense Arena.
Une nuit torride sur la Seine musicale
Après le Zénith en septembre 2022 et la salle polyvalente de Bercy en novembre 2023, le roi de la kora – ayant succédé à son père disparu – vient de franchir un cap en investissant la mythique Défense Arena. Des basses puissantes offraient une expérience sonore et visuelle d’exception dans cette salle, l’une des plus vastes d’Europe. Pour ceux qui doutaient encore de la capacité de l’artiste à relever un tel défi, ils ont été servis. Sidiki Diabaté, dans la fleur de l’âge, demeure toujours au sommet de sa forme. Chose qui a échappé à plus d’un : le 8 février était aussi le jour d’anniversaire de l’artiste. Trente-deux ans bien compté. Le public, transporté par la magie du live, dans une ambiance surchauffée comme un night club à trois heures du matin, oscillait entre ferveur et contemplation. Mais le doute n’était pas permis. Un seul mot était de mise : s’abandonner dans ce grand raout.

Sidiki Diabaté @Diouf
Une performance bien léchée
Le fils de Toumani Diabaté a fait honneur aux siens, la caste des griots du Mandingue – et surtout à son père, Toumani Diabaté. Lorsque le “king of” kora est entré sur scène… Que dis-je ? Il n’est pas entré sur scène; il en est littéralement sorti. Quand la lumière, incandescente, est tombée sur le public très féminin, une ovation vibrante, rythmée par des applaudissements et des acclamations a résonné dans l’immensité de l’arène. Et l’artiste, couronne d’or sur la tête, en blaser noir, est sorti d’une trappe ingénieusement disposée au milieu de la scène. Les fans du crooner malien, électrisés par les jeux de lumières sophistiqués, les écrans géants diffusant des images en haute définition et une acoustique calibrée pour une restitution sonore parfaite, ne tenaient plus en place. Une ferveur à peine croyable pour ce jeune artiste qu’on avait vite fait de classer dans le tiroir des stars passées de mode.
Moment d’immersion transcendant
Ce fut une soirée riche en surprises, notamment grâce à la diversité des styles musicaux. Bien qu’on s’attendît à entendre ses mélanges harmonieux de musique traditionnelle et de sonorités contemporaines, nous avons tout de même été bluffés par la dextérité de l’artiste. Les basses, profondes et cristallines, résonnaient sans saturer, tandis que chaque note jouée sur la kora de Sidiki Diabaté semblait flotter dans l’espace, enveloppant l’audience dans une immersion musicale pure. Mélangeant habilement la musique traditionnelle malienne avec des genres modernes tels que le rap, le hip-hop et le R&B, il a, et excusez-moi du pléonasme, fait applaudir la foule des deux mains. Reprenant en chœur avec le public ses titres à succès, Sidiki Diabaté, avec le talent exceptionnel qu’on lui connaît, a fait vivre au public une expérience musicale unique. Une performance captivante.
Des invités de marques
Sidiki Diabaté a aussi invité certains de ses amis à monter sur scène. Au rang de ces personnes, il y avait plusieurs artistes de renom tels que Mokobé, Black M, Sidy Diop et Wally Seck. L’instant clé fut lorsqu’il s’est mis à enchaîner les classiques de son répertoire comme “Béni” (2019) et “Kora Lover” (2024). Et surtout les chorégraphies parfaitement exécutées. Dans la plus grande salle de spectacle d’Europe (U Arena), le nouveau roi de la kora a écrit une nouvelle page de sa carrière. « Ce concert, c’est la renaissance, une nouvelle ère pour la musique mandingue », a-t-il confié. Comme il l’avait fait en novembre 2023 à l’Accor Arena (Bercy) de Paris, Sidiki Diabaté a réitéré son exploit en remplissant les 40 000 places de l’U Arena. Il avait promis des étincelles, nous avons vu des flammes rugir des téléphones portables.

Sidiki Diabaté @Chasseur d’images
Un moment décisif
Visuellement ce n’était pas le Super Bowl, mais la scénographie était spectaculaire. Des projections lumineuses transformaient la salle en un décor mouvant, amplifiant l’émotion du spectacle. L’éclairage, synchronisé avec les rythmes mandingues et les envolées vocales du roi de la kora, sublimait chaque moment. L’événement a également été l’occasion pour le virtuose de la kora de jauger le succès de son tout nouvel album, “Kora Lover”, auprès du public européen et de la diaspora africaine. Et cette nuit fut l’occasion parfaite pour cela. Avant le concert, il avait posté sur ses réseaux sociaux : « J’ai hâte de vous retrouver ce samedi 8 février dans la plus grande salle d’Europe pour écrire ensemble une nouvelle page de l’histoire de la musique africaine ». Nous pouvons dire, après le concert, que les notes puissantes de la kora de Sidiki Diabaté résonneront pendant longtemps dans les couloirs de La Défense Arena.
CULTURE
MARTINIQUE – Jerryka Jacques-Gustave, une voix d’exception “marquée au fer” par Johnny Hallyday

À la mort de Johnny Hallyday, chacun avait quelque chose à dire. De ceux qui avaient vu l’homme à la sortie de l’Accord Arena et de ceux qui n’avaient jamais entendu une note de sa musique. Ça frôlait la saturation. Mais parmi tous, s’il y a avait une personne qui le connaissait tant dans la vie que sur scène, ce serait Jerryka Jacques-Gustave, sa choriste. Lever de rideau sur une artiste hors-pair.
De Johnny Hallyday aux Trois Mailletz
Jerryka Jacques-Gustave n’est plus à présenter. Ou peut-être que si. Car si nous avons tous, un jour, entendu sa voix, il faut reconnaître qu’il n’est pas toujours facile d’y associer un visage et un nom. Il s’agit pourtant de la ravissante choriste martiniquaise, belle, fluette, au sourire ravageur, qui se tenait derrière la légende du rock, Johnny Hallyday. Vous voyez maintenant ! Même si Johnny n’est plus, Jerryka n’a jamais cessé de faire résonner sa voix dans les salles de spectacle parisiennes, notamment dans le célèbre cabaret Aux Trois Mailletz.
Artiste précoce
Jerryka Jacques-Gustave n’a pas toujours été dans l’entourage de Johnny. Ancienne choriste de ce dernier, dont elle fut la cheffe d’orchestre pendant quatre ans, elle a su saisir sa chance lorsqu’une opportunité s’est présentée. Son parcours n’a cependant pas toujours été fait de lumières et de strass. Tout commence pour Jerryka à Fort-de-France. Âgée de seulement 12 ans, elle chante pour la première fois dans la cathédrale de la ville. Après une longue pause musicale, son destin prend un tournant décisif lorsqu’elle monte à Paris en 1983, à l’âge de 17 ans. Désillusion ! Les Parisiens n’ont pas l’image idyllique qu’elle s’était toujours représentée. Entre études de coiffure et petits boulots, elle fait une rencontre qui va changer sa vie : un inconnu l’invite à poser sa voix en studio. Cette opportunité la mène vers la talentueuse Édith Lefel et, surtout, Pedro Wognin, son mentor et futur compagnon, qui l’invite chez lui en Côte d’Ivoire, un pays qu’elle adoptera comme une seconde patrie.
Jerryka : des piano-bars au Stade de France
À la fin des années 1980, Jerryka se produit au Back Street, un piano-bar que Johnny Hallyday adore. Dix ans plus tard, sans se douter du tournant que sa carrière s’apprête à prendre, elle est convoquée à une audition avec deux autres choristes. Son cœur bondit dans sa poitrine. La surprise est immense lorsqu’elle apprend qu’elle vient d’être sélectionnée pour accompagner l’idole des jeunes lors de son mythique concert au Stade de France. “Nous avons été prises pour faire avec Johnny le Stade de France. Là, la vraie aventure a commencé”, se souvient-elle avec émotion. En tant que cheffe choriste, elle doit apprendre plus de 51 chansons et proposer des arrangements vocaux. Au-delà du défi que représente une telle responsabilité, elle y voit une opportunité inoubliable qui donne un nouvel élan à sa carrière.
Des anecdotes sur un Johnny généreux et perfectionniste
De Johnny, Jerryka garde le souvenir d’un artiste hors du commun qui “[…] est au-dessus de la star […]”. Soucieux de son public et avide de dépassement de soi, il “[…] voulait toujours se surpasser, se mettre en danger. Il montait dans un hélicoptère, passait sous une trappe… Il se mettait vraiment en danger, mais le show était tellement beau », raconte-t-elle, admirative. Elle se rappelle aussi un moment amusant : un jour, Johnny apprend qu’elle organise un dîner chez sa mère avec quelques invités. Il lui lance alors, faussement vexé : “Je suis déçu de ne pas être invité.” Jerryka rit encore en racontant cette anecdote. Finalement, Laeticia et lui rejoignent la tablée, partageant un moment chaleureux autour du célèbre crabe antillais de la famille. Un autre souvenir marquant la fait sourire : lors d’un concert à l’Olympia, une choriste mal attachée perd sa chaussure en pleine prestation. Celle-ci frôle l’oreille de Johnny, qui éclate de rire et peine à reprendre sa chanson tant la situation l’amuse. Puis vient l’instant fatal qu’elle n’oubliera jamais : le 6 décembre 2017. Johnny Hallyday s’éteint alors qu’elle chante dans un cabaret. Elle se remémore alors un moment de tendresse : lors d’un concert de Sylvie Vartan, où elle était choriste, Johnny l’avait présentée au public en déclarant qu’elle était “l’une des meilleures”. Selon elle, tout l’homme est là.
Jerryka, entre musique et naturopathie
Jerryka Jacques-Gustave continue de chanter au cabaret Aux Trois Mailletz, où elle émerveille son petit public d’habitués. Cela lui convient. Mais loin de se limiter à la musique, elle explore aussi d’autres horizons : elle est modèle pour maquillage et éducatrice en santé naturelle, spécialisée en nutrition, naturopathie et phyto-aromathérapie. Avoir chanté aux côtés de Johnny Hallyday a été pour Jerryka “une expérience unique […] qui l’a marquée au fer”.
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