CULTURE
CÔTE D’IVOIRE – “Tout l’univers dans la tête” ou de tocard à héros de Kounda
Il faut être un Yacouba pour porter “Tout l’univers dans la tête”. Kounda n’est pas un Yac, un Yacouba. Mais, il ne s’en sort pas si mal. Avec ce roman, Kounda nous projette en 2040 dans un Abidjan qui n’est pas si différent du nôtre. Ce roman se lit comme on boit le dernier verre de gbèlè qui va nous mettre (au) tapis.
Alors voilà. Nous sommes en Côte d’Ivoire, quelque part à Abidjan, dans les années quarante – du siècle en cours. Nous ne savons pas à quel moment les extraterrestres ont débarqué. Mais, ils sont là : ils parlent, jugent, demandent des conseils aux humains. Parfois. Souvent. Pendant ce temps, les Abidjanais, eux, picolent, s’envoient en l’air, pour finir en chute libre, fracassés dans les caniveaux, avec une gueule de bois bien carabinée. Et au milieu de cette fresque – ou de ce foutoir, ou de ce bordel, c’est selon – il y a un type paumé. C’est le narrateur. Et, comme il n’a pas de nom, on va l’appeler : le mec au mojito.
Le mec au mojito est un mec banal, atrocement quelconque. Bref, c’est un raté. Toute sa vie se résume à un mot : regret. Lâché par ses rêves, constamment ivre, il parle trop, il rit mal. Il bande quand il ne faudrait pas. Il parle comme un stand-upper maladroit. Il a cette ironie désespérée de ceux qui savent qu’ils saoulent tout le monde avec des blagues stupides, mais qui continuent, quand-même, à faire des blagues. Parce que c’est tout ce qui leur reste.
Et puis Élisa. Biologiste. Sexy. Brisée. Avec un sourire bandant et un corps qui scintille comme une étoile avant une supernova. Elle arrive – au fond d’un “bar moite” – comme un contrepoint, une lumière fêlée. Et pendant que le monde vacille… et pendant qu’un lézard cosmique – le fameux Yac – tente de plaider qu’en exterminant l’humanité, il a voulu la sauver, elle, elle est là. Présente. Inutile. Essentielle. C’est ça : à la fois inutile et essentiel. Asymptote terrible. Elle ne crée rien, mais rien ne peut se créer sans elle.
C’est ça, la force de Kounda : ce refus de choisir entre le grotesque et le sublime. Il veut tout. Des gbaka en panne, des tchoins mal maquillés, du koutoukou mal distillé, des juges cosmiques, risibles et ridicules, et des écrivains ratés qui ressemblent étrangement aux écrivains lacustres, lagunaires, ivoiriens. Il mélange tout. Il jette. Il déborde. Et oui, ça gueule. Ça radote. Ça répète. Mais ça vit. C’est une langue qui ne tient pas en place. Une langue, pas celle du 18e siècle français, mais une langue qu’on entend avant de la comprendre. Une langue cassée. Vraiment. Une langue de bar et de bagarre. Une langue de survie. La langue des Abidjanais qui, quand elle frôle le clitoris de l’émotion, met les sens en feu.
Et c’est peut-être là, dans ce chaos, qu’émerge une question. Non pas une réponse, jamais. Mais une vraie question : pourquoi sauver un monde qui fait tout pour précipiter sa chute ? Pourquoi aimer quand tout est foutu ? Pourquoi écrire quand personne ne lit… lira ?
Et on sort de ce livre on a le sentiment que quelque chose a bougé. Changé en nous. Autour de nous. Qu’on a approché une forme d’humanité à la dérive. Bon, je vais me répéter. Si vous aimez la prose sage, les intrigues bien ficelées, les héros héroïques, passez votre chemin. Mais si vous avez le goût du vertige, du vin tiède, de la parole blessée alors ce livre est pour vous. Pour nous. Pour ceux qui savent que rire, parfois, est tout ce qu’il reste.



CULTURE
CÔTE D’IVOIRE – Dopelym, symbole d’une unité générationnelle
Dopelym pourrait être décrit comme un artiste à la fois d’ici et d’ailleurs. Avec plus de 110 000 abonnés, plus de 20 millions de streams cumulés et une communauté fidèle, active et bouillonnante – la « Dopeframily » – il s’inscrit dans la lignée d’artistes comme Didi B ou Himra, avec lesquels il a d’ailleurs collaboré. Mais son style reste unique : plus mélodique, plus réfléchi. Il parle au cœur autant qu’à la tête, mêlant le son et le sens. Le 20 décembre 2025, il sera sur la scène du Palais des Congrès du Sofitel Abidjan Hôtel Ivoire pour un concert qui s’annonce comme une véritable consécration.

Né à Levallois-Perret, Dopelym – de son vrai nom Dope – est un artiste franco-ivoirien âgé d’une vingtaine d’années. À cet âge, il séduit déjà par la singularité de sa trajectoire artistique. Et comme il aime le dire lui-même, son flow est « le reflet de [sa] réalité ». Sa musique mêle afrotrap, drill et rythmes ivoiriens. Là où d’autres cloisonnent, lui (r)assemble : les beats du 93 rencontrent le nouchi abidjanais et convoquent parfois le créole. Une musique hybride et fédératrice, à l’image d’une génération d’ascendance africaine, fière de ses racines et lucide sur les défis contemporains.

Pourtant, Dopelym n’est pas qu’un artiste : il est aussi étudiant en relations publiques internationales et diplomatie. De quoi surprendre. Le jour, il étudie les mécanismes du dialogue entre les peuples ; le soir, il transforme la scène en un autre espace diplomatique – celui de l’émotion brute. Pour lui, chanter ou rapper, c’est aussi « négocier avec la vie, les doutes, le monde ». Et ce monde, il l’a déjà conquis : du Palais de la Culture d’Abidjan au Mother Africa Festival, en passant par le Burkina Faso, le Mali, le Bénin, le Canada, ou encore la France, où il s’est produit au Casino de Paris et à l’Olympia aux côtés de Jungeli.

Dopelym n’est pas un inconnu, même s’il cultive la discrétion. À l’heure du streaming à outrance, il s’impose aussi comme une icône digitale. Son clip « Nouveau Départ » cumule des millions de vues sur YouTube, son single « Guala » flirte avec les 8 millions de streams, et son projet “Who Is Døpe?” (2025) dépasse les 5 millions d’écoutes sur Spotify. Des chiffres impressionnants pour un artiste encore dans la vingtaine – fruits d’un savant mélange de sincérité et de stratégie. Là où beaucoup peinent à exister dans la masse des playlists, lui s’impose par une identité visuelle forte et une écriture introspective. Ses textes évoquent la résilience, la quête de reconnaissance, et cette tension intime d’une jeunesse partagée entre loyauté et ambition.

Sur scène, Dopelym ne triche pas. Il donne tout. Son premier grand concert, au Palais de la Culture d’Abidjan, devant 8 000 spectateurs, a marqué les esprits : énergie, maîtrise, sincérité, tout y était. Depuis, il n’a plus besoin d’un marketing tapageur. Sa fanbase solide parle pour lui. Et c’est fort de cette confiance qu’il prépare son prochain grand rendez-vous : le 20 décembre 2025, au Palais des Congrès du Sofitel Abidjan Hôtel Ivoire.






CULTURE
SÉNÉGAL – Dakar célèbre la musique sénégalaise : trois jours de notes endiablées
Sous la direction du Professeur Ibrahima Wane, «Regards croisés sur l’évolution de la scène musicale sénégalaise» s’annonce comme une traversée inédite du patrimoine sonore et musical du Sénégal.
Du 27 au 29 octobre, Dakar, la capitale sénégalaise, replongera dans l’histoire de sa musique. Placé sous la direction du Professeur Ibrahima Wane, cet événement entend revisiter les artistes, les chansons et les courants musicaux qui ont façonné l’identité musicale du Sénégal : du chant des griots aux hybridations contemporaines. Organisé par le Laboratoire Littérature, Langues et Sociétés d’Afrique de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), « Regards croisés » conjugue trois dimensions : la réflexion académique, les performances artistiques et la célébration populaire. Trois jours, trois lieux, trois thèmes pour explorer la trajectoire d’un univers musical qui n’a jamais cessé de se réinventer.

À travers des conférences, projections et concerts, l’événement propose une véritable radioscopie de la musique sénégalaise : ses héritages, ses mutations et ses imaginaires. Le parcours commencera par les premiers foyers musicaux de Rufisque et Saint-Louis, pour remonter jusqu’à la mondialisation du mballax. « Regards croisés » sera une plateforme d’échanges entre artistes, chercheurs, producteurs et journalistes, mais aussi un espace de mémoire et de transmission. Le Professeur Ibrahima Wane, directeur de l’événement, explique : « La musique sénégalaise est un miroir de notre société, un reflet de nos histoires et de nos aspirations. Cet événement est une invitation à comprendre son passé, à célébrer son présent et à imaginer son futur. »

Du 27 au 29 octobre, la musique sénégalaise sera à l’honneur, de Rufisque à Dakar. Tout débutera au Cercle Culturel Maurice Guèye avec une table ronde intitulée « L’héritage musical des premières villes sénégalaises », animée par Sahite Sarr Samb, Yatma Fall, Pape Armand Boye et Rokhaya Daba Sarr (Africa Fête). Le lendemain, le 28 octobre, la Maison de la Culture Douta Seck accueillera une conférence sur « Des airs “typiques” au mballax : visages et usages de la musique sénégalaise », animée par Felwine Sarr, Michael Soumah, Ngoné Ndour et Abdoul Aziz Dieng. Enfin, le 29 octobre, à la Place du Souvenir Africain, sera projeté le documentaire « Le mballax dans tous ses états », suivi d’un échange intitulé « Le mballax, ses éclats et ses écarts », en présence de Dudu Sarr, Moustapha Diop, Abdou Bouri Ba et Maïmouna Dembélé. Pour clore ces trois jours, une grande soirée musicale rétro rendra hommage aux années 1970-1980.

Conçu comme un dialogue entre mémoire et innovation, cet événement s’inscrit dans une réflexion profonde sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Il fait écho à la Convention de 2003 de l’UNESCO, dont le Professeur Ibrahima Wane est le référent national. Sous sa direction, « Regards croisés » devient un acte de transmission : il relie les anciens orchestres urbains aux nouvelles scènes digitales, fait dialoguer les générations d’artistes et rappelle que, au Sénégal, la musique demeure une forme vivante de récit collectif. Professeur titulaire de littérature africaine orale à l’UCAD, docteur d’État ès lettres, chercheur et critique, Ibrahima Wane incarne cette articulation rare entre savoir et création. Figure majeure du paysage intellectuel sénégalais,


CULTURE
MALI – Le Festival international Chant des Linguères donne la voix aux femmes africaines
Du jeudi 6 au samedi 8 novembre 2025, à Bamako, les voix féminines africaines feront, pour cette deuxième édition du Festival international Chant des Linguères, vibrer le fleuve Djoliba jusque dans ses rives. Placée sous le thème « La culture, levier et facteur de développement », cette édition sera, une fois encore, l’occasion pour Coumba Gawlo d’affirmer son engagement artistique et social en faveur du continent.
Initiatrice du festival, Coumba Gawlo revient cette année avec un thème fort et porteur de sens. L’événement sera l’occasion de promouvoir les droits des femmes et la protection des enfants, à travers les actions de Go Médias et de l’association Lumière pour l’Enfance – Coumba Gawlo (LPE-GC). Ambassadrice de bonne volonté auprès de plusieurs institutions et ONG, l’artiste voit dans la musique un outil puissant de plaidoyer, de communication et de sensibilisation, capable de transformer les mentalités.
Le Festival international Chant des Linguères est un événement entièrement animé par des femmes. Il porte une ambition claire : faire entendre la voix des artistes féminines sur des enjeux majeurs tels que l’autonomisation économique des femmes, le leadership féminin, la prévention de la transmission mère-enfant du VIH, la scolarisation des filles, la santé maternelle et infantile, ou encore la lutte contre les violences basées sur le genre et le mariage précoce.

Coumba Gawlo est née avec une voix au timbre d’or et de cristal. Un don hérité de sa mère, qui la destinait déjà à un brillant avenir. À seulement 14 ans, elle remporte le concours « Voix d’Or du Sénégal » grâce à Soweto, une chanson écrite par son père. En 1990, elle signe chez Syllart Records son premier album, Seytané, qui la fait connaître du grand public. Suivront quatre autres albums. Malgré plusieurs distinctions locales, la consécration internationale tarde à venir. Mais en 1998, à la surprise générale, elle dévoile Yo Malé, une véritable pépite musicale. L’album, sur lequel figure Patrick Bruel, lui vaut un double disque d’or en Belgique et un disque de platine en France. Et le succès ne s’arrête pas là : la chanson Pata Pata achève d’asseoir sa notoriété sur la scène internationale.
Aux côtés de Coumba Gawlo, cette deuxième édition réunira des artistes venues du Mali et du Burkina Faso : Mariam Bâ Lagaré, Djeneba Diaouné, Delphine Mounkoro et Kalam, surnommée la Reine du Kundé, partageront la scène pour célébrer la force, la créativité et la solidarité féminines. Pendant ces trois jours de festivités, le programme s’annonce riche : une conférence de presse inaugurale ouvrira l’événement, suivie, le vendredi 7 novembre à 9 h, d’un forum thématique. Le soir, la musique reprendra ses droits avec un grand concert populaire à la Place du Cinquantenaire. Le festival se clôturera le samedi 8 novembre à 20 h, au CICB, par un dîner de gala placé sous le signe du partage et de l’inspiration.
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