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LIBYE : La guerre reprend.

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Le maréchal Haftar, l’homme fort de l’Est libyen, a lancé l’assaut sur Tripoli le 4 avril. Le dialogue inter-libyen que l’ONU compte maintenir mi-avril aura bien du mal à se tenir dans ce contexte guerrier.

La conférence nationale de dialogue inter-libyen, censée se tenir du 14 au 16 avril à Ghadamès dans le sud du pays, est maintenue « à la date prévue », a déclaré le 6 avril le représentant spécial de l’ONU, Ghassan Salamé. Tout en ajoutant : « Sauf si des circonstances majeures nous en empêchent. » Car le climat est à nouveau plus à la guerre civile qu’à la réconciliation dans la Libye déchirée depuis la chute et la mort du colonel Kadhafi en 2011.

L’ONU annonce maintenir la conférence inter-libyenne de la mi-avril

L’ONU annonce maintenir la conférence inter-libyenne de la mi-avril
Trois jours auparavant, le maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de Cyrénaïque, la grande région de l’est, a clamé que « l’heure a sonné » en lançant ses troupes – 20 000 à 25 000 hommes – de l’autoproclamée armée nationale libyenne (ANL), à l’assaut de la capitale, Tripoli. C’était sans compter la mobilisation des milices de la Force de protection de Tripoli et de certaines milices de Misrata, liées au gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez el-Sarraz, installé dans la capitale avec le soutien de l’ONU depuis 2015. Depuis lors, les affrontements violents se multiplient à moins d’une trentaine de kilomètres au sud de Tripoli. La force pro-GNA a même mené un raid aérien depuis Misrata contre des positions de l’ANL.

L’escalade du conflit
Le 7 avril au soir, Tripoli faisait état d’un premier bilan de 32 morts. L’ANL, de son côté, en recensait 14. « Un tir de mortier de l’ALN a tué six civils, dont un médecin aimé de tous qui était en train de sauver des victimes dans son ambulance », précise Jalel Harchaoui, chercheur à l’Institut des relations internationales de Clingendael aux Pays-Bas. Le ministère de la santé a déclaré l’état d’urgence dans les hôpitaux de Tripoli et des environs. L’ONU a lancé un « appel urgent » à une trêve provisoire de deux heures le 7 avril, en fin de journée, pour évacuer les blessés et les civils. Et la compagnie pétrolière italienne ENI a décidé de rapatrier tous ses ressortissants.

Les pressions internationales, la réunion en urgence et à huis clos du conseil de sécurité de l’ONU le 5 avril au soir, la « profonde inquiétude » du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui était en Libye au début des hostilités, n’ont en rien enrayé l’escalade du conflit qui, en trois jours, a ruiné les longs efforts de dialogue patiemment relancé par Ghassan Salamé depuis sa prise de fonction à l’été 2017.

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Bien au contraire, l’ALN annonçait à son tour un raid aérien le 7 avril. Les forces pro-GNA lançaient en riposte leur opération « volcan de la colère » pour « nettoyer toutes les villes libyennes des agresseurs et des forces illégitimes », selon leur nouveau porte-parole, le colonel Mohamad Gnounou. Et la veille, d’après le quotidien The Libya Observer, Fayez al-Sarraj convoquait l’ambassadrice Béatrice du Hellen pour protester contre le soutien de la France au « chef de guerre Haftar », Paris étant soucieux de ménager les deux parties et encline à miser sur un avenir national pour le maréchal.

Les espoirs d’une solution ruinés
Jamais les espoirs d’une solution pour la Libye n’avaient pourtant paru autant à portée de main qu’en ce début 2019. Le 28 février, lors d’une rencontre à Abu Dhabi, Fayez al-Sarraj et Khalifa Haftar, avaient promis de s’entendre sur la nécessité de préserver la stabilité et d’unifier les institutions du pays. Un nouveau gouvernement d’union nationale devait être formé, puis une feuille de route devait être élaborée en vu d’élections générales.

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« Haftar avait réussi à convaincre par-delà les frontières. Il avait remporté des soutiens après son intervention dans le Fezzan [la grande région du sud] en début d’année. Mais fort de ces avancées diplomatiques, il recourt à la force brute car, in fine, c’est un militaire qui ne croit qu’en une solution militaire, analyse Jalel Harchaoui. Il n’a pas hésité à instrumentaliser l’ONU, croyant pouvoir arriver en vainqueur à la conférence nationale, non pas pour négocier mais pour rafler la mise. »

Mais face à ce « coup de poignard dans le dos », comme l’a dénoncé Fayez al-Sarraj, selon le chercheur, le maréchal a surtout réussi à nourrir l’acrimonie et le conflit en remobilisant contre lui les milices de la Tripolitaine, alors que certaines d’entre elles étaient, par pragmatisme, prêtes à se mettre autour de la table.

Source: la-croix.com

       

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