ART
SENEGAL – Mémoire d’une lutte : immersion dans l’exposition sur les manifestations

Au Musée des Civilisations noires de Dakar, ce mercredi 21 mai 2025, une exposition photographique revient sur une page marquante et encore vive de l’histoire contemporaine du Sénégal. Intitulée « Première ligne », elle retrace les grandes mobilisations populaires survenues en 2021, 2023 et 2024 contre le régime de Macky Sall, mettant en lumière les moments de tension, de répression et de résistance. L’exposition s’achève sur l’avènement de Bassirou Diomaye Faye à la présidence en avril 2024, symbolisant un tournant politique majeur pour le pays.
Sur les murs, des clichés poignants replongent les visiteurs dans les violentes manifestations : nuages de gaz lacrymogène, barricades, incendies… Dans une petite salle, des photographies exposent les blessures de certains manifestants.
Fodé Mané, professeur venu avec ses élèves, est profondément ému. « Ça me rappelle des moments très, très difficiles que nous avons vécus ici au Sénégal. Plus jamais ça… C’était très dur, j’en ai les larmes aux yeux », confie-t-il.
Si les souvenirs restent vifs pour Fodé, d’autres visiteurs ont suivi les événements à distance. L’artiste Alioune Diagne se trouvait alors en France : « Je regardais tout à travers la télé et les informations. J’étais très choqué… C’était pendant le confinement. C’était très stressant, car ma famille est ici, au Sénégal. Ces images me rappellent vraiment ces moments forts. »
L’exposition permet aussi à certains visiteurs de mieux comprendre cette page récente de l’histoire politique sénégalaise. Éloïse, une jeune femme d’origine sénégalaise venue de France, confie : « Je ne connaissais pas l’histoire depuis la création du parti jusqu’à l’élection du président. Je connaissais juste le nouveau président, mais j’ignorais tout ce qui s’était passé avant. »
Les noms des victimes de la répression seront inscrits sur un mur, encore vierge pour l’instant. L’exposition retrace également l’arrivée au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko en avril 2024. Plusieurs sympathisants sont venus observer les œuvres. « Ça nous a fait plaisir de voir comment les jeunes se sont battus pour le président Diomaye et Sonko. C’était vraiment marquant », témoigne Mamie à la sortie. « Du jamais vu dans l’histoire politique du Sénégal. »
Au cœur du projet, Abdou Karim Ndoye, photographe de terrain devenu conseiller à la présidence et photographe officiel de Bassirou Diomaye Faye, échange longuement avec les visiteurs sur le contexte de chaque image.
Parmi ses clichés favoris, une photo prise en mai 2023 à Ziguinchor : de jeunes militants assis sur des sacs empilés, faisant barrage pour protéger le domicile d’Ousmane Sonko, alors opposant. « Cette photo me touche particulièrement parce qu’elle incarne la première ligne, explique le photographe. Quand on observe leurs postures, leurs cagoules… Je trouve l’image très iconique. J’ai trouvé extraordinaire ce que ces jeunes faisaient. C’était du jamais vu dans notre histoire politique. Il fallait immortaliser ces instants. Les barrages, leurs stratégies… Ce sont des jeunes qui étaient prêts, déterminés à se battre jusqu’au bout, au péril de leur vie. »
Source : RFI, Juliette Dubois
Crédit photo : rfi, Juliette Dubois
ART
CÔTE D’IVOIRE – Les mères de l’indépendance : la compagnie Djôlocro fait fureur à l’Hôtel Ivoire

Le dimanche 17 août 2025, au théâtre de l’Hôtel Ivoire, à Abidjan, se jouait la pièce de Yann Aka : “Les mères de l’indépendance/La marche des femmes sur Grand-Bassam”. Mais avant que le rideau ne s’ouvre, c’est la compagnie Djôlocro, une troupe exclusivement féminine, qui a eu l’immense honneur de faire patienter le public.
Une entrée aux allures d’une déclaration de guerre
Soudain, Zokou, une femme-mâle, surgit de l’ombre. Elle a la voix rauque et la poitrine bombée. Son cri, un hurlement effroyable, déchire le silence comme un chat qu’on recrache après l’avoir trop longtemps gardé en travers de la gorge. Dans une langue locale, elle appelle les siens comme cela se faisait autrefois avec les tambours. Les guerriers (ou les amazones) des villages alentours se sortent et se ressemblent comme un seul homme (pourquoi pas une seule femme !) autour d’une cause commune. Comme nous avons affaire à des femmes ici, appelons-les les amazones. Donc, à cet appel, les amazones répondent. Et de quelles manières ? À travers des pas de danses. Leurs corps se tendent, elles frappent les poings et donnent de la voix. Plus qu’une performance, c’est une forme de haka, cette danse de combat exécutée lors de rituels.
Djôlocro, le visage de bonheur
Créée en décembre 2018, la compagnie Djôlocro est composée de six performeuses africaines. Cette sextette de femmes veut montrer, par leur musique, le riche patrimoine culturel de la Côte d’Ivoire. Grâce à un mélange entre la tradition et la modernité, ces performeuses mettent en lumière, à travers la danse et la musique, notre identité africaine. La toute première création de compagnie dénommée “la cour royale” voit le jour en 2019. Et puis, en 2020, la troupe forme des enfants de 5 à 15 ans. Il faut attendre 2023 pour assister à la deuxième création de la troupe : “Souffle”.
Le chant et la danse comme armes
Dans cette lutte métaphorique, les guerrières titubent, tombent, mais finissent toujours par se relever. Et puis, il y a les coupures de lumière qui traduisent une nuit sans lune et aussi les accélérations de rythme qui rappellent les jours qui ne veulent pas finir. Leurs chants disent la douleur, mais pas que ça. Ils disent aussi l’espérance. Leurs tambours, les “dunumbas” battent la marche comme jadis les djeli galvanisaient les combattants. C’est alors, Djôlocro bondit comme des lionnes et elles se jettent sur l’adversaire. Face à l’ennemi – invisible, mais bien présent –, celui qui tente de réduire la femme à l’état de captive, elles opposent la force d’un corps collectif. La victoire, ici, va au-delà d’un simple effet de mise en scène. En effet, elle est vécue, incarnée, transmise au public. Les spectateurs applaudissent ce théâtre chorégraphique qui raconte une histoire assez particulière.
Djôlocro, passeuse de mémoire
Littéralement Djôlocro signifie “le visage du bonheur”. Un nom qui lui va comme un gant. En effet, la mission de la troupe est claire : faire rayonner le patrimoine culturel ivoirien, redonner à la femme toute sa puissance symbolique et peindre les réalités contemporaines avec la palette des traditions. Bref, cette troupe est dans la transmission. On peut dire que le pari a été tenu. Car dans la nuit du 17 août 2025, à l’Hôtel Ivoire, la compagnie Djôlocro a rappelé qu’une indépendance – politique, culturelle, féminine – n’est jamais acquise. Elle se rejoue à chaque génération. Il faut, en effet, mettre du respect sur le nom de Djôlocro. Des bêtes de scène, oui. Mais surtout, des passeuses de mémoire.
ART
SÉNÉGAL – Khady Sarr, l’essence de la danse africaine

Khady Sarr est une véritable prêtresse de la danse en Afrique. Il n’y a qu’à la voir danser pour se rappeler cet emblématique nom de la danse : Germaine Acogny. Sans aucun doute, elle est une des héritières de cette déesse de la danse. Installée en depuis plus d’une quinzaine d’années, Khady Sarr est une danseuse remarquable, une chorégraphe hors-pair et pédagogue d’origine sénégalaise. Comme plein d’artistes qui s’expriment dans bien de domaine, Khady, elle, exprime son identité à travers la danse. Son style, qui se nourrit d’influences multiples, invoque des gestuelles gracieuses.
Khady Sarr, un corps entre la terre et le cosmos
Née à Médina, un quartier de Dakar, Khady hérite par sa naissance d’un riche patrimoine culturel : le Lébou, le Sérère et le Diola. Elle n’a rien demandé. Comme tous les enfants Sénégalais, son apprentissage s’est fait de façon naturelle ; c’est-à-dire au rythme des fêtes populaires et des rituels traditionnels qui, encore aujourd’hui, donnent aujourd’hui un sens à cette danse.Née dans les ruelles bruissantes de la Médina, à Dakar, Khady Sarr est issue d’un triptyque de peuples — Lébou, Sérère, Diola — dont les traditions circulent depuis la nuit des temps par la musique et le corps. Très tôt, son apprentissage commence naturellement, au rythme des fêtes de quartier et des cérémonies de sabar. Pas de miroir, pas de salle de danse : juste la rue, les tambours, et le feu intérieur. Mais loin de s’enfermer dans un folklore figé, Khady choisit la respiration comme méthode, l’émotion comme boussole. Elle danse avec l’intention d’aligner les corps avec l’univers.
Les années de formation de Khady
Khady Sarr a bu dans les meilleurs abreuvoirs. Formée par de grands maîtres tels que le chorégraphe Joe Bousenzy du ballet “Forêt Sacrée” de Dakar en danses mandingues, elle a élargi ses connaissances en intégrant la formation “Cie Lullaby” du chorégraphe Alain Gonotey en danse contemporaine lorsqu’elle arrive en France. Là-bas, précisément à Bordeaux, elle bénéficie de l’enseignement de Mame Adama Camara et de Ousmane Gallo Soumah, deux grands danseurs issus des ballets africains de Guinée. Ensuite, elle bénéficie de l’accompagnement de Vincent Harisdo pendant la création de son solo de danse “Racines”. Elle ne s’arrête pas là. Elle veut mieux comprendre le corps et sa maîtrise. Aussi, elle décide de se former au yogalates et au pilates au centre d’Evelyne Frugier à Cannes. Très impliquée dans la question de la transmission, elle considère que des mots tels que “respiration”, “ancrage”, “conscience du corps, de son mouvement et de sa musicalité” constituent les ingrédients fondamentaux du langage de la danse. C’est dans cette optique, qu’elle crée à Bordeaux en 2022 le projet de Master class autour du cercle Sabar qui s’intitule “Oser le cercle-Sabar et Féminité”. En 2024, elle lance Tambali, une classe où la spiritualité rencontre l’apprentissage somatique.
L’art : un outil de transformation
Fondatrice de l’association Yobalema, Khady conçoit l’art comme une chose en perpétuel mouvement, une action. Chez elle, chaque mouvement, chaque projet est un voyage. Une forme d’art, un dialogue solidaire qui vise à unir un territoire, une communauté et une histoire. À Kelle, un village de pêcheurs sénégalais, elle a co-construit avec des femmes un jardin biologique, un terrain de rencontres et d’émancipation. “On ne peut pas penser solidarité avec les logiques de don et de réciprocité déséquilibrée. Il faut co-imaginer, traduire les ODD en wolof, remettre du sensible.”, dit-elle. Son militantisme, doux, se nourrit de gestes simples et de mots justes. Il se voit aussi à travers ses créations scéniques. Dans “Identité Noire”, solo né d’une question posée par sa fille métisse sur la Reine des Neiges, Khady interroge les stéréotypes de beauté imposés aux enfants. Elle explore les douleurs de l’altérité, les joies de la transmission, et les puissances du corps féminin. Aussi dit-elle : “Je suis artiste, femme, mère, citoyenne engagée pour une humanité plus résiliente”.
Danser pour se relier… à l’univers
Aujourd’hui, elle se partage toujours entre la transmission www.khadysarr.con, et la scène à travers ses derniers créations telles que « Racines » , « Taxaw-Debout » « Fragments d’humanité » qu’elle est venue présenter au Figas à Blois ou encore « Taxaw-Debout » qui parle sur le droit des peuples.
Artiste très engagée Khady a initié un projet phare sur l’espace public à Bordeaux
« Le grand Sabar de Bordeaux » qui célèbre sa 11e édition le 13 septembre 2025.
Depuis 3 ans elle a co-fondé le collectif CAADNA, le Collectif des artistes Africains et Diasporas de la Nouvelle Aquitaine qui déroule la 3e édition de son festival à Darwin les 30 et 31 Août 2025.
ART
SÉNÉGAL – Latsouck Ndiaye connecte Blois à l’Afrique par la création

Cela fait maintenant neuf ans que Blois vit au rythme du FIGAS qui se tiendra du 12 au 20 juillet 2025. Une relation entre mémoire royale et création afro-diasporique. Cependant, au centre de cette métamorphose culturelle, il y a un nom qui revient avec constance. C’est celui de Latsouck Ndiaye. En effet, depuis 2017, ce professionnel de la culture, formé entre Dakar, Avignon et les grandes institutions internationales fait du Festival International de la Gastronomie, des Arts et de la Scène (FIGAS) un carrefour où les créateurs se ruent sur la région Centre-Val de Loire. Ce projet est porté par l’association Afrik’Consult.
De Dakar à Blois, Latsouck Ndiaye aux manettes
L’histoire commence à Dakar, dans les salles de l’Université Cheikh Anta Diop. Latsouck Ndiaye s’y forge une passion pour les arts vivants, nourrie par une formation solide à l’Institut Supérieur des Techniques du Spectacle (ISTS) d’Avignon. Il y obtient un master en communication culturelle à l’Université d’Avignon. Et ce parcours le mène dans des univers variés. D’abord, à la Maison de la Culture Douta Seck, ensuite au ministère de la Culture du Sénégal, et puis après aux projets européens et africains. Et ainsi de suite. La culture, chez Ndiaye, est une passerelle, un pont de savoir et d’émotions. C’est dans cette optique qu’il initié un festival à taille humaine, mais qui a une ambition universelle.
FIGAS : un festival humain, avec une grande ambition
Le FIGAS, créé à Blois, en collaboration avec la municipalité de Marc Gricourt et le tissu associatif local, revendique une programmation exigeante, populaire et festive. Son leitmotiv : faire dialoguer artistes, artisans, publics et professionnels autour des expressions africaines et diasporiques. Musiques, danses, contes et gastronomie. Pour cette édition, le FIGAS offre un tourbillon de pratiques et de voix, entre showcases intimes, ateliers participatifs et grandes scènes.
Des noms, des voix, des lieux
Du Pan Piper à Paris à la place Louis XII de Blois, le festival va regrouper une grand nombre d’artistes. Cela répond à une logique de circulation des artistes et de maillage territorial. Parmi les têtes d’affiche de cette édition, il y aura la talentueuse Queen Rima, Ndary Diouf, Adama Dahico, Patche Di Rima, ou encore le Kin Orchestra. Mais le FIGAS, c’est aussi des rencontres impromptues, des ateliers sabar où l’on danse avant de comprendre, des contes murmurés aux enfants, des marchés où l’artisanat dialogue avec l’innovation.
FIGAS : une transmission
À la fin de cette édition, prévue le 20 juillet, il y aura hommage qui sera rendu à Pathia Lam, directeur artistique, disparu trop tôt. Ce sera une façon pour Latsouck Ndiaye de rappeler que l’espace culturel n’est pas qu’un lieu de célébration, mais aussi de mémoire. Et d’avenir : “Ce que nous portons avec le FIGAS, ce n’est pas seulement un festival, c’est une démarche”, insiste-t-il.
Le programme se décline ainsi :
Date Heure Lieu Événement 12 juillet 2025 20h00 Pan Piper (Paris) Concert : Patche Di Rima, Adama Dahico, Samba Peuzzi 13 juillet 2025 22h00 Péniche Baruda (Paris) Concert : Niema Maneri, Mwassi Moyindo, Authentique BD 16 juillet 2025 18h00 Médiathèque Maurice Genevoix (Blois) Instant FIGAS : Rencontre avec Nana Menthe et Andra Kouyaté 16 juillet 2025 19h30 Place Louis XII (Blois) Soirée d’ouverture : Khady Sarr, Djiboome Casa, Yeumeukaye, Azigbo 18 juillet 2025 16h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Atelier sabar 18 juillet 2025 20h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Dîner de gala (20€) : Mwassi Moyindo, Khady Sarr, Adama Dahico, Ndary Diouf, Astou Seck 19 juillet 2025 10h00 – 13h30 Espace Jorge Semprun (Blois) Foire artisanale & Rencontres professionnelles 19 juillet 2025 14h30 Espace Jorge Semprun (Blois) Ateliers enfants & Visites touristiques 19 juillet 2025 16h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Showcases : Di-Mallah, Kouekadoh, Djiboome Casa 19 juillet 2025 20h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Concerts de Ndary Diouf, Queen Rima et Samba Peuzi 20 juillet 2025 10h00 – 13h30 Espace Jorge Semprun (Blois) Foire artisanale & Rencontres professionnelles 20 juillet 2025 14h30 Espace Jorge Semprun (Blois) Ateliers enfants & Visites touristiques 20 juillet 2025 16h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Showcases : Monife, Mirya Bika, Patche Di Rima, Yeumeukaye & Fintihock 20 juillet 2025 20h00 Espace Jorge Semprun (Blois) Soirée hommage à Pathia Lam : Nana Menthe, Authentique BD, KIN Orchestra
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