Connect with us

AFRIQUE DE L’OUEST

TOGO – ENQUÊTE LIBÉ : Affaire Orion Oil : chaussures en alligator, palaces et grands crus… la vie fastueuse de Lucien Ebata

Publie

le

L’homme d’affaires de 53 ans dépensait sans compter, notamment en France, une fortune issue du pétrole congolais. Généralement en cash, et sans oublier d’arroser des proches et des dignitaires du régime de Sassou-Nguesso.


Libération révèle les rouages de ce qui pourrait être l’un des principaux circuits de détournement des recettes du pétrole congolais, de Paris à Brazzaville en passant par la Suisse et Monaco. En cause, la société Orion Oil et son patron Lucien Ebata, proche du président Denis Sassou-Nguesso et aux multiples relations avec des personnalités économiques et politiques françaises.


«C’est quelle voiture que vous avez reçue ?» Au téléphone, Lucien Ebata semble perdu ce 6 décembre 2016, d’après une conversation interceptée par les enquêteurs des douanes judiciaires. Le concessionnaire, basé à Paris, rit et répond : «Ben, celle que vous nous avez commandée.» Le patron du groupe Orion ne se souvient plus de quel véhicule il est question. Il ne s’agit pourtant pas d’une citadine d’occasion mais d’une Bentley décapotable blanche. Le vendeur rappelle dans la conversation qu’il reste un solde de 274 435 euros à payer. Une paille. L’homme d’affaires a peut-être la mémoire qui flanche car il possède de nombreux véhicules en France à l’époque : deux Land Rover break, deux Porsche Cayenne, une Bentley Continental, une Mercedes Classe E et une Fiat 500. Il y a de quoi s’y perdre.

La fortune de Lucien Ebata se compte-t-elle en millions ou en milliards d’euros ? Mystère. Le Canado-Congolais de 53 ans ne figure pas dans les classements d’ultrariches qu’a l’habitude de publier le magazine Forbes, dont il possède une franchise pour l’Afrique francophone. Face à une juge d’instruction, le 20 décembre 2021, Lucien Ebata assure que ses «revenus annuels» sont compris entre 1 et 5 millions d’euros. Des chiffres qui semblent sous-évalués au regard de son train de vie délirant, très bien documenté dans l’enquête judiciaire qui lui vaut d’être mis en examen en France. C’est peu dire que Lucien Ebata mène la grande vie, financée à coups d’argent liquide dont les enquêteurs pensent qu’il provient d’un système élaboré de détournement de fonds publics au Congo-Brazzaville. Un montage sophistiqué qui profite aux dignitaires du régime de Denis Sassou-Nguesso, mais aussi à Ebata lui-même.

Interrogé en garde à vue en octobre 2021 sur un possible blanchiment, l’homme d’affaires avait déclaré : «Je réfute cette analyse.» Contacté par Libération, Lucien Ebata, présumé innocent, a répondu par la voix de son avocat, Me Antoine Vey : «Nous déplorons la violation du secret […]. Cette divulgation cause à M. Ebata et son groupe un important préjudice réputationnel.»

Advertisement

Une addition rondelette de 5 594 euros
A Paris, l’une des boutiques préférées du patron d’Orion est le magasin de vêtements Zilli, proche des Champs-Elysées. Des factures attestent qu’il y a dépensé en 2011 et 2012 plus de 235 000 euros – en espèces. Le 8 décembre 2011, il fait une razzia dans les rayons, s’allégeant en une seule visite de 38 000 euros pour acquérir costumes, chemises, pantalons et une paire de chaussures en alligator à 3 600 euros.
Pour ses repas parisiens, Lucien Ebata apprécie la cuisine du Laurent, un restaurant de luxe dans le VIIIe arrondissement. Le 31 mai 2012, en compagnie de dix convives, il s’en sort avec une addition rondelette de 5 594 euros, réglée en cash. Le menu est des plus fins : foie gras, langoustines, tronçons de turbot, homards, friands de pied de porc, le tout arrosé notamment d’un château d’Yquem 1961 et d’un Mouton Rothschild à 1 150 euros chacun.
A Paris où vivent son épouse et ses enfants, le patron d’Orion ne possède pas de bien immobilier. Il est en revanche propriétaire dans d’autres pays, en république démocratique du Congo, en Espagne, en Afrique du Sud… Ce patrimoine s’élève à plusieurs millions d’euros, selon des traces d’opérations bancaires retrouvées par les enquêteurs. A Paris, il a longtemps habité rue Beaujon, près de l’Arc de triomphe, pour un loyer mensuel de 5 500 euros. La famille a ensuite déménagé avenue Marceau, près des Champs-Elysées. Lors de la perquisition de son domicile en mai 2017, les douanes judiciaires ont découvert que l’homme d’affaires aimait particulièrement les montres de luxe. Ils en ont trouvé neuf, notamment des marques Rolex, Jaeger-LeCoultre, Chopard et Dior. Elles ont fait l’objet d’une estimation par un expert, qui a établi une fourchette allant de 38 200 à 56 850 euros pour l’ensemble.

Une facture d’hôtel de 493 000 euros
Pour voyager, Lucien Ebata utilise des avions privés de façon effrénée. Dans une note du 22 juin 2017, Tracfin, le service de renseignement financier de Bercy, note que la société Jet Monde a facturé aux différentes sociétés de l’homme d’affaires pour près de 7 millions d’euros de prestations lors des trois années précédentes. Lucien Ebata ne profite pas seul de cette vie extravagante : il entretient un vaste cercle de parents, d’amis et de collaborateurs, ainsi qu’un réseau d’officiels congolais, des relations à chérir pour la préservation de son business et son statut. Tout un petit monde qui apprécie les palaces parisiens. Les enquêteurs français ont récupéré auprès du Peninsula, le grand hôtel favori de l’homme d’affaires, des factures colossales à son nom ou à ceux de ses plus proches. Editée le 14 juillet 2017 après l’occupation pendant un mois et demi de deux chambres – dont la 111, une des suites les plus chères –, l’une d’entre elles s’élève à 493 000 euros.

L’un des invités les plus récurrents et onéreux du patron d’Orion est assurément l’ex-ministre des Finances du Congo Calixte Nganongo. Ce dernier a eu droit, entre 2016 et 2018, alors qu’il était membre du gouvernement, à une soixantaine de nuitées tous frais payés dans les plus beaux établissements, pour un montant total de 278 000 euros. Ce personnage central du régime de Brazzaville, ex-dirigeant de la Société nationale des pétroles du Congo, a toutes les attentions d’Ebata. Peu après la nomination de Nganongo au gouvernement en mai 2016, l’homme d’affaires lui a commandé pour 60 500 euros d’articles de maroquinerie et de chaussures dans une boutique des Champs-Elysées. Pour l’occasion, la vendeuse a été envoyée à Brazzaville afin de prendre la pointure du ministre. S’agissait-il d’un geste destiné à s’assurer les bonnes grâces du grand argentier ? «Il est possible que lorsque M. Nganongo [est] devenu ministre des Finances, il se soit adressé à moi pour le conseiller sur des vêtements et des chaussures», a répondu Lucien Ebata en garde à vue en octobre 2021. Un vrai ami.

Source : Libération

Advertisement
Continuer la lecture
Advertisement
Cliquez ici pour commenter

Laisser un commentaire

AFRIQUE

BÉNIN – Patrice Talon s’exprime sur la traque des mutins et la réforme constitutionnelle

Publie

le

Le président béninois Patrice Talon s’est exprimé sur deux dossiers majeurs de l’actualité nationale : la poursuite des auteurs des événements du 7 décembre dernier et la récente révision de la Constitution, promulguée le 17 décembre 2025.

Concernant la tentative de mutinerie, le chef de l’État a assuré que la traque du principal responsable et de ses complices se poursuit activement. Un mandat d’arrêt international a été émis, et les autorités béninoises ont sollicité la coopération des pays voisins afin de faciliter leur localisation et leur extradition. Sans citer de pays précis, Patrice Talon a indiqué que les auteurs de ces actes ont été manipulés par des responsables politiques qu’il qualifie de « nostalgiques et jaloux », avec l’appui de soutiens extérieurs.

Le président n’a pas mâché ses mots à l’égard des mutins, les qualifiant de « crapules », de « voyous » et de « marginaux ». Il s’est félicité de l’absence totale de ralliement, tant au sein de l’armée et de la Garde nationale que de la population. Évoquant le cas de Pascal Tigri, Patrice Talon a révélé que ce dernier avait été contacté par son supérieur hiérarchique et invité à se rendre, avant de prendre la fuite en tenue civile. Il a salué le professionnalisme et la loyauté des forces de défense et de sécurité, qu’il a jugées « extraordinaires ».

Le second volet de son intervention a porté sur la révision constitutionnelle, vivement critiquée par l’opposition. Patrice Talon a rejeté toute accusation d’allongement déguisé du mandat présidentiel et a clarifié la notion de trêve politique. Selon lui, celle-ci ne vise qu’à empêcher une campagne électorale permanente, rappelant que la Constitution encadre déjà strictement les périodes de campagne. Il a précisé que la critique de l’action publique demeure pleinement garantie.

Enfin, s’agissant de la création du Sénat, le président a défendu cette institution comme un organe d’arbitrage destiné à prévenir les blocages institutionnels et à assurer la stabilité politique, estimant que son expérience du pouvoir en démontre la nécessité.

Advertisement

Continuer la lecture

AFRIQUE

MALI – L’imam Dicko et la CFR lancent la « troisième voie » contre la junte

Publie

le

Au Mali, le paysage politique en exil s’organise avec l’essor de la Coalition des forces pour la République (CFR). Lancée début décembre 2025, cette organisation placée sous l’égide de l’imam Mahmoud Dicko enregistre ses premiers ralliements de poids. Son objectif est sans équivoque : mettre un terme à une transition militaire qui dure depuis plus de cinq ans et restaurer l’ordre constitutionnel ainsi que les libertés fondamentales.

Housseini Amion Guindo, dit « Poulo », ancien ministre et figure de proue de l’opposition, est le premier grand leader politique à officialiser son adhésion. Pour lui, la CFR représente une « troisième voie » indispensable face au dualisme destructeur entre la « dictature implacable » de la junte et la menace jihadiste. Selon Guindo, ces deux extrêmes se nourrissent mutuellement, piégeant le peuple malien dans une impasse sécuritaire et démocratique.

D’autres personnalités, comme Abdoulaye Coulibaly (ICAP) et Oumar Abdou Touré (Kaoural Renouveau), ont également rejoint le mouvement. Ils voient en l’imam Dicko, figure morale historique déjà au centre de la chute d’Ibrahim Boubacar Keïta en 2020, le seul « repère incontournable » capable de fédérer les Maliens autour d’un projet de résistance pacifique. La CFR appelle désormais à la désobéissance civile pour contraindre le pouvoir militaire à rendre les rênes du pays.

Cependant, une interrogation subsiste : le silence de son mentor. Exilé en Algérie, l’imam Mahmoud Dicko ne s’est pas encore exprimé publiquement sur cette coalition dont il est le référent républicain. Si de nombreux acteurs du mouvement prodémocratie soutiennent la dynamique, ils attendent une déclaration officielle du guide avant de s’engager totalement. Ce nouveau pôle d’espérance parviendra-t-il à ébranler le régime de Bamako depuis l’extérieur ? L’avenir de la résistance malienne semble désormais suspendu aux mots de l’imam.

Continuer la lecture

AFRIQUE

GUINÉE BISSAU – L’épouse de l’ex-président mise en examen au Portugal

Publie

le

La police judiciaire portugaise a annoncé, mardi 16 décembre 2025, la mise en examen de Dinisia Reis Embalo, épouse du président bissau-guinéen déchu Umaro Sissoco Embalo, pour des soupçons de contrebande et de blanchiment de capitaux. Cette procédure judiciaire fait suite à une opération menée à Lisbonne après l’arrivée d’un jet privé en provenance de Bissau.

Selon les autorités portugaises, Dinisia Reis Embalo est arrivée au Portugal le week-end dernier à bord du même avion qu’un autre passager interpellé dès son arrivée, Tito Fernandes, chef du protocole de l’ancien président renversé. L’arrestation de ce dernier, intervenue le dimanche 14 décembre à l’aéroport militaire de Lisbonne, est à l’origine de l’enquête en cours.

Tito Fernandes était en possession de cinq millions d’euros en espèces, une somme immédiatement saisie par la police. Il est soupçonné de contrebande et de blanchiment de capitaux. Bien qu’il ait été remis en liberté après son interpellation, les investigations se poursuivent afin de déterminer l’origine et la destination des fonds transportés. L’ouverture de la procédure visant Dinisia Reis Embalo est directement liée à cette affaire, précisent les enquêteurs.

D’après l’agence de presse portugaise Lusa, le vol avait pour destination finale Dubaï, ce qui renforce les soupçons portant sur un circuit financier international. L’enquête aurait été déclenchée à la suite d’une dénonciation anonyme signalant des mouvements suspects à bord de l’appareil.

Depuis le coup d’État qui l’a renversé, Umaro Sissoco Embalo a quitté la Guinée-Bissau. Il aurait successivement trouvé refuge à Dakar puis à Brazzaville, avant de s’installer au Maroc, selon plusieurs sources concordantes.

Advertisement

Cette affaire est accueillie favorablement par certaines organisations de la société civile bissau-guinéenne. Le Frente Popular, par la voix de son coordonnateur Armando Lona, dénonce un « régime au service du crime organisé » et considère cette mise en examen comme un signal fort adressé à l’opinion publique et aux réseaux impliqués dans des pratiques financières illicites.

Continuer la lecture
Advertisement

DERNIERS ARTICLES

FACEBOOK

PUB

NEWS +