AFRIQUE CENTRALE
TCHAD – Le politologue Babacar Justin Ndiaye revient sur le conflit dans le pays
La chronologie rappelle que la France a installé puis balayé tous les Présidents qui se sont succédé à la tête du Tchad« , c’est la conviction du politologue sénégalais Babacar Justin Ndiaye. Ce dernier, dans un texte publié sur les réseaux sociaux ce mardi 20 avril 2021 à la suite de la mort du président Idriss Déby, revient sur les mouvements rebelles au Tchad. Babacar Justin Ndiaye évoque amplement l’histoire de Mahadi Mahamat Ali, fondateur du mouvement Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad (FACT), tombeur d’Idriss Déby. Voici l’intégralité de l’analyse du politilogue sénégalais, publié juste après l’annonce du décès de l’homme fort du Tchad, à l’âge de 68 ans.
La rébellion aussi offensive que soudaine, dans le sillage de l’élection présidentielle au Tchad, a tiré les observateurs de la torpeur profonde dans laquelle le règne interminable du Président et non moins Maréchal Idriss Déby les avait inéluctablement plongés. Le ruisseau de sang et le panorama de la mort sont là, dramatiquement envahissants. Une succession de scènes tragiques qui couvrent les cartes, cachent les dessous de cartes et masquent certains acteurs et leurs parrains proches ou lointains.
Depuis 1964-1965, l’Histoire des rébellions chroniques au Tchad a révélé des hommes qui ont tenu – suivant des durées variables – le haut du pavé médiatique et politique. Parmi lesquels figurent Ibrahim Abatcha (tué au combat par la Légion Étrangère), le Docteur Abba Siddick, Hissène Habré, Goukouni Weddèye, Ahmet Acyl, et autre Acheik Ibn Omar. La liste est emblématique, mais non exhaustive. Sans oublier, bien sûr, Idriss Déby qui a été successivement militaire, maquisard et chef de l’État.
En ce mois d’avril 2021, l’homme qui est aux avant-postes de la guerre soudaine contre le régime trentenaire de Ndjaména est très peu connu en dehors des hautes sphères diplomatiques, des milieux cloisonnés du Renseignement international et des cercles politiquement branchés de la Diaspora tchadienne. Son nom, son profil, son parcours et, surtout, les traces de son itinéraire fournissent une mine d’informations sur les jeux et les enjeux de toutes sortes qui conditionnent le futur immédiat du Tchad post-Déby.
Né en 1964, Mahadi Mahamat Ali appartient au grand groupe ethnique des Goranes, à l’instar de Hissène Habré. Il vit à Rennes, en France, en compagnie de son épouse et de ses enfants. Rennes où il a décroché un Master en Gestion. C’est le côté cour tout à fait tranquille de sa vie.
En revanche, le côté jardin de Mahadi Mahamat Ali est moins lisse et moins linéaire. Féru de politique et frénétique dans l’engagement, le fondateur du Front pour l’Alternance au Tchad (FACT) a flirté avec tous les mouvements de rébellions armées des années 2000. À ce titre, il a côtoyé les Herdimi et autre Nouri qui ont fait le coup de feu dans le Tibesti ou le long de la frontière tchado-soudanaise.
Toutefois, c’est au lendemain du renversement de Kadhafi par la France de Nicolas Sarkozy que Mahadi Mahamat Aly a pris son envol. Depuis 2011, il a multiplié les séjours en Libye et longtemps bivouaqué à Benghazi sous la protection du fameux Maréchal Haftar, l’homme fort de l’Est libyen. Avec Haftar, le futur Président du FACT a combattu contre le gouvernement de Tripoli présidé alors par Fayez el-Sarraj. Avec Haftar, il a partagé les mêmes parrains que sont la France et le Qatar. Deux pays en duo dans le dossier libyen.
Du reste, on murmure qu’à travers une certaine division du travail ou un certain partage des rôles, c’est Paris qui aiguillonne stratégiquement la guerre de Mahadi Mahamat Ali ; tandis que Doha la finance à coups de millions de dollars, pour acquérir pas moins de 800 Toyota Land-Cruiser, des stocks d’armes et des tonnes de munitions. Au moment où cet article est publié, le chef du FACT, Mahadi Mahamat Ali, est signalé dans la petite agglomération de Tanoua, une bourgade à cheval sur la frontière entre la Libye et le Tchad.
L’Histoire ne se répète pas. Néanmoins, elle bégaye. La chronologie rappelle que que la France a installé puis balayé tous les Présidents qui se sont succédé à la tête du Tchad. De François Tombalbaye à Idriss Déby, en passant par le Général Félix Malloum et Hissène Habré. Sans oublier les chefs d’État de Transition comme Lol Mahamat Choua, Goukouni Weddèye et Jean Alingué.
Justement, Idriss Déby qui a de la mémoire, doit faire maintenant des cauchemars, avec le souvenir de son avènement au Pouvoir, en décembre 1990, au détriment du Président Hissène Habré. En effet, c’est à l’issue d’une rencontre dans l’Île de Crête, en Grèce, entre François Mitterrand et Mouammar El Kadhafi que le sort de l’actuel locataire de la Prison de Cap Manuel (Hissène Habré) a été scellé, avec un modus operandi jusque-là invariable : Kadhafi avait payé les équipements militaires, Gaafar El Nimeiri avait offert le Soudan comme base arrière et la France avait dépêché l’agent Paul Fontbonne de la DGSE pour épauler Idriss Déby dans son raid victorieux. Question : Paris a-t-elle présentement programmé Mahadi Mahamat Ali comme, hier, elle avait programmé Déby et déprogrammé Habré ?
Indiscutablement l’armée gouvernementale a saucissonné puis déchiqueté une colonne rebelle qui s’est aventurée loin de ses bases, jusque dans le Kanem, sans un flux continu de la logistique. Il n’empêche que l’alerte reste chaude et préfigure un sursis pour un Maréchal utile dans le Sahel mais usé par trois décennies de surplace politique.
AFRIQUE
RD CONGO – Marche de partis de la majorité pour dénoncer l’« agression rwandaise »
À Kinshasa, une mobilisation politique s’est tenue pour dénoncer la poursuite des violences dans l’est de la République démocratique du Congo et exiger le retrait du mouvement rebelle M23 ainsi que des forces rwandaises accusées de le soutenir. En treillis militaire, béret rouge sur la tête et drapeau national noué autour du cou, Sylvain Mutombo, leader du RDT, a conduit les militants de son parti dans les rues de la capitale, appelant à l’unité nationale face à ce qu’il qualifie d’agression étrangère.
Au cours de la marche, les manifestants ont interpellé les États-Unis, leur demandant de veiller au respect des engagements pris dans le cadre des discussions internationales. Pour Sylvain Mutombo, il s’agit de défendre la souveraineté nationale par des moyens politiques, diplomatiques et légaux afin de mettre fin aux exactions attribuées au M23 dans l’est du pays.
Parmi les participants, Micheline, serrant contre elle une effigie du chef de l’État, a exprimé un message sans ambiguïté : elle appelle le président rwandais Paul Kagame à retirer ses troupes et à laisser le Congo vivre en paix, affirmant que, malgré les épreuves, le pays restera uni.
La marche s’est achevée dans l’enceinte du Parlement par un bref rassemblement. Par la suite, un comité restreint conduit par André Mbata, secrétaire permanent de l’Union sacrée, a entamé une démarche diplomatique. Des mémorandums ont été remis successivement aux ambassades belge et américaine, ainsi qu’à la nonciature, afin de demander à la communauté internationale de traduire ses engagements en actes concrets pour faire cesser l’agression et obtenir le retrait effectif du Rwanda.
Toutefois, la mobilisation est restée limitée, marquée par l’absence de plusieurs partis de la majorité présidentielle. Dans l’opposition, la coalition Lamuka a qualifié l’initiative de « mobilisation au rabais », estimant que l’enjeu sécuritaire exigeait une réponse politique plus large et plus inclusive.
AFRIQUE
RD CONGO – L’AFC/M23 annonce un retrait conditionnel d’Uvira sous pression américaine
Le mouvement rebelle AFC/M23 a annoncé, dans la nuit du lundi 15 au mardi 16 décembre, son retrait unilatéral de la ville d’Uvira, deuxième agglomération de la province du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo. Cette décision intervient moins d’une semaine après la prise de la ville et dans un contexte de pression diplomatique croissante exercée par les États-Unis sur le Rwanda, accusé de soutenir le groupe armé.
Dans un communiqué, l’AFC/M23 affirme que ce retrait répond à une demande américaine et s’inscrit comme un « geste de confiance » destiné à appuyer le processus de Doha engagé entre le mouvement et les autorités de Kinshasa. Le groupe conditionne toutefois son départ à plusieurs exigences, notamment la démilitarisation de la ville, la protection des populations civiles et le contrôle effectif du cessez-le-feu par le déploiement d’une force dite neutre.
Aucun calendrier précis n’a été communiqué et l’ampleur réelle du retrait reste incertaine. L’annonce ne concerne, à ce stade, que la ville d’Uvira, sans clarification sur le sort des localités environnantes, notamment Makobola et d’autres zones conquises après le 10 décembre. Par ailleurs, l’AFC/M23 exclut toute reprise immédiate de la ville par les FARDC ou les groupes Wazalendo, considérant cela comme une ligne rouge sécuritaire.
La question de la « force neutre » évoquée demeure floue. La Monusco n’est pas déployée au Sud-Kivu et le mouvement rebelle la considère comme partie prenante au conflit. De son côté, le gouvernement congolais s’est toujours opposé à l’instauration d’une zone tampon, et aucune négociation concrète n’a encore été engagée sur les mesures sécuritaires transitoires prévues par l’accord-cadre de Doha.
Cette annonce survient alors que Washington durcit le ton contre Kigali. Les autorités américaines accusent le Rwanda d’alimenter l’instabilité régionale et d’avoir violé les récents engagements de paix. Des sanctions ciblées contre des responsables rwandais sont désormais envisagées, renforçant l’incertitude autour de l’évolution du dossier sécuritaire dans l’est congolais.
AFRIQUE
RD CONGO – L’offensive du M23 sur Uvira : une « gifle » diplomatique pour les États-Unis
Moins d’une semaine après la signature de l’accord de paix de Washington, qualifié de « grand miracle » par Donald Trump, la ville stratégique d’Uvira, dans l’est de la RDC, tombe progressivement aux mains du M23. Soutenus par le Rwanda, les rebelles ont pénétré mercredi dans les quartiers nord de la ville, provoquant la déroute des forces armées congolaises et une panique généralisée parmi la population.
Pour le Burundi voisin, cette offensive constitue une « gifle » infligée aux États-Unis et une humiliation diplomatique. Le ministre burundais des Affaires étrangères a fermement condamné l’attaque, réclamant des sanctions contre Kigali. En réaction immédiate, Bujumbura a fermé sa frontière, désormais considérée comme zone militaire, tandis que les rebelles verrouillaient le passage côté congolais. Kigali, de son côté, rejette la faute sur la RDC, l’accusant de violer le processus de paix.
Sur le terrain, la situation humanitaire s’aggrave dramatiquement. Plus de 200 000 personnes ont été déplacées au Sud-Kivu depuis le début du mois, et plus de 45 000 réfugiés ont fui vers le Burundi en quelques jours. Les habitants d’Uvira vivent terrés chez eux, témoins de l’impuissance des soldats congolais qui, dans leur fuite, se livrent parfois au pillage.
Cette conquête éclair, appuyée selon l’ONU par des milliers de soldats rwandais, fait craindre le pire à Kinshasa : une possible avancée du M23 vers le Katanga, poumon minier et économique du pays, ce qui porterait un coup fatal à l’État congolais.
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