C’est regrettable de perdre cinq âmes à la fleur de l’âge après une demi-finale d’un match organisé dans le cadre des « navétanes » dans le département de Rufisque. Amadou Thiam, jeune écrivain sénégalais, a pourtant alerté plusieurs fois le gouvernement sur la nécessité de réfléchir sur le contenu et la forme de ces activités de vacances qui occupent une bonne partie de la jeunesse. Dans son livre publié en 2018 et intitulé « Le Sénégal d’aujourd’hui à demain », il a justement évoqué la violence dans les navétanes en mettant l’accent sur les vraies causes d’un phénomène de société rampant. Ze-africanews vous propose de découvrir ce passage du livre de ce professeur qui a analysé de fond en comble la percée de la violence au Sénégal.
« L’expansion de la violence et de la délinquance sont des phénomènes de société rampants et des choses inimaginables dans un pays comme le nôtre impliquent souvent négativement les jeunes. La fréquence des faits de violence est frappante, tels les meurtres, les agressions, les viols, les vols, les atteintes aux mœurs, le grand banditisme commis par des jeunes désœuvrés. Ces actes barbares, atroces, qui constituent la honte d’une société traditionnellement paisible, pacifique, travailleuse et digne, prennent une ampleur telle que si l’on y prend pas garde, le pays risque de sombrer dans une psychose de criminalité, d’insécurité difficilement surmontable (…) »
Le pays risque de sombrer dans une psychose de criminalité, d’insécurité difficilement surmontable (…) »
Il en est de même de la pratique du football populaire de quartier appelé « navétanes ». C’est l’occasion qui s’offre à une frange de la jeunesse désœuvrés, sans repères, sans espoir de lendemains meilleurs car habitués au gain facile et à l’oisiveté de semer le trouble dans la société. Les navétanes, en dépit de leur forte signification sociale, sont le lit de la violence et de la délinquance. Chaque année, les bagarres ou batailles rangées entre habitants de quartiers font des victimes, au nez et à la barbe des forces de défense et de sécurité, et des autorités administratives qui autorisent ces rencontres palpitantes et très passionnées.
Par exemple, au Stade Alboury Ndiaye de Louga, le samedi 25 octobre 3015, un jeune du nom de Cherif Ly, âgé de 14 ans, succomba après l’explosion d’une grenade lancée par un élément du Groupement Mobile d’Intervention (GMI) dans la tribune. Le jeune fut piétiné par un grand nombre de spectateurs qui tentaient de prendre la fuite. Une semaine après, à Bounkiling, dans le région de Sédhiou, un jeune de 20 ans à été battu à mort par les supporters adverses et, n’eut été l’intervention des militaires postés à quelques encablures de là, le pire se serait produit.
Les navétanes, en dépit de leur forte signification sociale, sont le lit de la violence et de la délinquance.
Même le président des communicateurs traditionnels du Sénégal, El Hadji Mansour Mbaye, une célébrité en matière de médiation sociale et de traditions, a été victime de la furie des jeunes le même mois (Octobre 2015), sa maison ayant été la cible de jets de pierres des supporters de l’équipe des HLM 5, à l’occasion de la finale de la zone 3.
Le drame macabre le plus spectaculaire eut lieu au Stade Demba Diop le 15 juillet 2017 lors de la finale de la coupe de la ligue entre l’union Sportive de Ouakam et le Stade de Mbour avec une dizaine de morts et plus de 80 blessés.
Généralement, après les matchs ou les combats de lutte, des groupes de supporters communément appelés dans le langage juvénile « small »,ravagent tout sur leur passage en volant, en agressant et en violentant tous ceux qu’ils croisent (…) »
À noter que les navétanes sont un championnat populaire de football entre les Associations Sportives et Culturelles (ASC) de quartiers différents. C’est une compétition qui suscite beaucoup d’engouement chez les jeunes qui, hélas souvent, oublient les règles du sport et s’adonnent à des actes de violence après les matchs.